vendredi, juin 30, 2006

L'énergie, symbole intouchable de la souveraineté nationale

L'énergie, symbole intouchable de la souveraineté nationale

«Pour vous les Français, le retour de la royauté est impensable. Au Mexique, c'est la privatisation de notre compagnie pétrolière Pemex qui est inconcevable. C'est un pan essentiel de notre révolution!» Enoncée avec un brin de dérision, cette explication de Luis Rubio, président du Cidac (Centre de recherche pour le développement) n'est pourtant pas exagérée. Même le très libéral Vicente Fox, qui a tenté en vain d'introduire un peu de concurrence dans le secteur de l'énergie, préfère les partenariats public-privé. De quoi surprendre de la part d'un pays très ouvert au marché, détenteur du record des traités de libre-échange (avec 43 pays, dont les Etats-Unis, l'Europe et le Japon). Un pays qui n'a pas hésité à vendre ses télécoms, à céder ses plus grandes banques à des capitaux étrangers ou, récemment, à libéraliser le transport aérien.

«Pour comprendre, il faut remonter à 1938», affirme un haut-fonctionnaire mexicain spécialiste des questions énergétiques. A l'époque, l'industrie pétrolière appartient à des compagnies américaines et britanniques. Une grande grève survient chez l'une d'elles sur des revendications salariales. Le président Lázaro Cárdenas prend le parti des salariés, via un texte de loi. Mais face au refus des Britanniques de s'y plier, il nationalise le secteur. Et crée Pemex. Les compagnies étrangères seront indemnisées, le peuple entier se cotisant pour y participer. «C'est le début d'une mythologie populaire autour de ce symbole de souveraineté. On l'apprend à l'école...», ajoute ce haut-fonctionnaire, non sans ajouter, un peu accablé: «Ni l'Iran, ni l'Arabie saoudite, ni même Cuba n'ont fermé à ce point leur secteur pétrolier.»

Une ouverture très modeste

Autre monopole intouchable, celui de la distribution d'électricité par CFE (1). Luis Tellez, qui fut ministre de l'Energie du prédécesseur de Fox, Ernesto Zedillo, en sait quelque chose pour avoir élaboré en 1999 un projet de libéralisation complète de la production et de la distribution électrique. L'objectif était de maintenir, voire accroître sur le long terme, grâce à des investisseurs extérieurs, le taux de couverture du pays (95 %), en tenant compte du boom de la demande. Mais face à la mobilisation des syndicats et des députés, le projet de loi a été retiré, sans vote. Depuis, le gouvernement Fox a tenté à plusieurs reprises de faire passer des réformes. Sans succès. L'ouverture du secteur énergétique reste très modeste, via de simples contrats multiservices qui interdisent toute participation aux bénéfices (notamment dans le gaz, où le Mexique, devenu importateur, a de grands projets de terminaux).

Aujourd'hui membre de Carlyle, Luis Tellez, ancien membre du PRI, appelle à voter pour le PAN de Calderon, qui a promis de libéraliser l'énergie. «Il faut le faire pour l'électricité et le pétrole. On a besoin d'un président qui ait le courage d'aller vite en profitant de son état de grâce, estime-t-il. Notre production pétrolière commencera à décliner en 2008. Il faut donc lancer de toute urgence des investissements énormes en exploration production.» Avant d'ajouter: «Je ne veux pas qu'on privatise Pemex, je veux qu'elle entre dans le marché.»

De fait, malgré la hausse des cours et une très bonne rentabilité avant impôts, le monopole pétrolier a du plomb dans l'aile. Sureffectifs, coûts de production élevés... «Pemex est aux mains des ingénieurs et des syndicats. S'il y a une grève, le pays s'arrête», dénonce Luis Tellez. Fox s'est certes attaqué à la corruption qui régnait au sommet en punissant un scandale de versements de fonds au PRI. Selon les connaisseurs de la maison, cependant, du nettoyage reste à faire «à tous les étages».

Enorme ponction fiscale

Mais le mal dont souffre surtout l'entreprise, c'est la ponction fiscale sans équivalent que lui impose l'Etat, lui prélevant certaines années «jusqu'à 65% de son chiffre d'affaires et 112% de son résultat avant impôts», souligne un proche du dossier (2). Le pétrole représente 40% des recettes fiscales du pays et finance la majeure partie du budget.

Résultat, Pemex est en sous-investissement chronique depuis des années. «Pemex exploite un important gisement mais n'a les moyens ni techniques ni financiers d'explorer d'autres zones», poursuit un expert. La branche pétrochimique du groupe, où le secteur privé n'est admis qu'à titre minoritaire, souffre des mêmes maux. Sixième producteur mondial de brut, «le Mexique exporte pour 24 milliards de dollars de pétrole par an mais importe pour 18 milliards de pétrochimie», remarque, désabusé, Pascal Lalouel, directeur général de Total à Mexico.

Faute d'investissement dans l'exploration, les réserves prouvées en hydrocarbures ont baissé et ne représentent plus que dix ans de production. «Pourtant, il y a beaucoup à faire en offshore profond, où Petrobras, Shell, BP ou Total ont des compétences», souligne Pascal Lalouel. «Mais nous n'investirons que si nous pouvons nous rémunérer en fonction de la production», ajoute-t-il.

mercredi, juin 28, 2006

Pétrole : Le Maroc, producteur ?

Depuis qu’on parle de la découverte du pétrole au Maroc, tout le monde s’y met, tout le monde cherche et guette mais, pour quel résultat ? A croire, comme diraient certains plaisantins, que le pétrole a des idées politiques... Sinon, comment expliquer le fait qu’il y en ait en Lybie, en Tunisie, en Algérie et en Mauritanie, mais pas au Maroc... Du coup, la moindre information sur cette rare denrée est suivie avec un intérêt sans pareil...

Cependant, indépendamment des rumeurs voire de l’« intox » qui veut que « le Maroc ait du pétrole, mais garde l’information secrète », la réponse du côté de l’Office National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM) est claire et sa position est sereine : les recherches à ce niveau sont rigoureuses et nécessitent beaucoup de moyens. Depuis 2000 et avec le nouveau Code minier, la visibilité est meilleure. L’on sait aujourd’hui où chercher les moyens adéquats et les sociétés sérieuses et compétentes effectuent recherches et explorations avec rigueur et ténacité ayant comme seul juge le facteur « temps »... Il faut donc attendre ou plutôt patienter car c’est d’un travail colossal qu’il s’agit.

Skidmore est une affaire aujourd’hui classée et ses mystères percés. C’était du Gaz que la compagnie avait découvert à Talsint et il fallait encore approfondir les recherches. Ceci nécessitait des moyens dont elle ne disposait pas. Ce qui a appelé une nouvelle recomposition du Capital. Aussi, le tour de table de la société a-t-il changé. Les nouveaux acquéreurs ont ainsi repris le travail là où il s’était arrêté pour entreprendre de nouveaux forages et de nouvelles analyses... Le feuilleton continue et la sagesse veut une attente passionnée mais pas impatiente de résultats...

Dans l’économie marocaine, le secteur des mines et des hydrocarbures occupe une place clé. Aussi, appelle-t- il des investissements importants permettant de valoriser le potentiel national en la matière. Car, si le secteur est prometteur, il a besoin d’un plus pour appuyer son développement. Diverses stratégies sont déjà mises en œuvre...


AU niveau du secteur des hydrocarbures, la filière « recherche » connaît un essor sans précédent. Actuellement, de nombreuses sociétés pétrolières internationales opèrent dans différentes régions du Maroc aussi bien en mer (offshore) que sur terre (onshore). Cet engouement est le fruit, à la fois, des termes assez favorables du code des hydrocarbures rénové et de la stratégie d’exploration- promotion clairement engagée aujourd’hui par l’Office National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM).

L’ONHYM, que dirige Mme Amina Benkhadra, intègre ainsi son action dans une politique énergétique marocaine qui vise essentiellement à assurer la sécurité d’approvisionnement du pays, notamment par le renforcement des infrastructures et des interconnexions énergétiques, la diversification des formes et des sources d’énergie et l’encouragement de la recherche pétrolière.

Cependant et malgré une coopération développée avec les compagnies pétrolières opérant au Maroc, le sous-sol demeure encore sous exploré sachant que l’étendue des bassins sédimentaires terrestres et maritimes est d’une superficie totale de près d’un million de km². L’offshore atlantique marocain, avec ses 350.000 km2 de bassins sédimentaires, constitue toujours, un objectif intéressant et une zone pratiquement vierge pour l’exploration. L’année 2005 s’est d’ailleurs inscrite dans cette optique en suivant la nouvelle dynamique de l’Office, basée sur une intensification de la recherche des hydrocarbures et de l’exploration minière. Ainsi, les travaux réalisés par les différents partenaires de l’Office, ont porté sur des acquisitions de données de gravimétrie et de magnétométrie, de données sismiques 2D et 3D, la poursuite des évaluations géologiques, géophysiques, géochimiques et pétrolières dans les différents permis et zones de reconnaissance avec l’intégration des nouvelles données issues des 3 forages offshore réalisés en 2004. Ces travaux sont destinés à mieux évaluer les objectifs existants, à constituer de nouveaux portfolios de prospects et à préparer de nouveaux programmes sismiques 3D et d’autres forages sur ces permis. Concernant les objectifs de l’année en cours, les efforts entrepris au niveau de l’exploration minière et pétrolière se poursuivent.

Dans le domaine de la recherche pétrolière, il est prévu la réalisation par les partenaires de l’Office de 6 forages, un forage en offshore par la compagnie malaisienne PETRONAS, deux forages par MPE dans la région de Tendrara, un forage par HEYCO à Maâmora-Moulay Bouselham, deux forages par CABRE dans le Gharb.

Pour sa part, l’ONHYM prévoit la réalisation de 2 forages dans le Gharb Pré-Rif. Ces plans entrent dans le cadre des orientations stratégiques de l’Office pour la période 2006-2009, qui visent une montée en puissance de l’exploration pétrolière et minière. En matière de recherche des hydrocarbures, de nombreuses sociétés pétrolières internationales ont manifesté leur intérêt pour plusieurs zones terrestres et maritimes. Les contacts ont abouti en sus des accords existants à la signature au cours du premier semestre 2006 de 5 accords pétroliers dont un en off-shore et d’1 contrat de reconnaissance.

L’activité de l’exploration minière porte sur la reconnaissance des secteurs et des prospects qui présentent les critères géologiques les plus favorables à la présence de minéralisations et se fait selon les trois axes suivants : - La recherche des métaux précieux (or et argent), qui occupe la part la plus importante de cette activité, couvre des objectifs situés essentiellement dans l’Anti Atlas et le Haut Atlas. Ainsi, les travaux ont permis de mettre en évidence des gîtes d’or à Tagragra d’Akka (provinces de Tiznit et de Tata) en cours de développement dans le cadre d’une convention avec MANAGEM, et à Had Imawn (province de Taroudant) dont les travaux de développement vont se poursuivre dans le cadre d’une convention, signée en mars 2006, avec la société canadienne Sanu Ressources. Dans le massif de Sirwa, la poursuite du développement du gîte d’or de Tafrent (province de Warzazate) par travaux de sondages a permis d’en augmenter les ressources. Des négociations pour la cession de ce projet sont en cours deux sociétés privées. Au niveau de la plaine de Tamlalt (province de Figuig), le lancement par l’ONHYM des travaux en 2000 a permis de circonscrire le gîte d’or de Jbel Malek dont le développement par sondages a donné des résultats intéressants ce qui a suscité l’intérêt de plusieurs compagnies privées nationales et inernationales. Un appel d’offres est en cours de lancement pour la cession de ce gîte au secteur privé. Au niveau de la bordure sud du Bas Draa (Province de Tan Tan), un indice d’or prometteur a été découvert au début de l’exercice 2005 et fait actuellement l’objet de développement par sondages. Au niveau des provinces du sud, le lancement des travaux depuis 2002 a permis de mettre en évidence des secteurs favorables aux minéralisations en métaux précieux et en métaux de base - Pour les métaux de base, l’intérêt est accordé en priorité à la recherche des gisements polymétalliques à Pb-Zn-Cu dans les massifs des Jebilet et Guemassa (autour de la ville de Marrakech) en partenariat avec Managem. Les travaux entrepris dans le cadre d’une convention entre l’ONHYM et la société finlandaise Outokumpu ont permis de découvrir le gîte polymétallique de Khwadra qui fait actuellement l’objet de travaux de développement dans le cadre d’une convention ONHYM - CMG. Dans le même sens et dans le cadre d’une convention ONHYM - CMG, les travaux de développement par travaux miniers du gîte polymétallique de Koudiat Aicha se poursuivent. Dans l’Anti-Atlas occidental (province de Taroudant), la recherche du cuivre se fait en partenariat avec la société canadienne Odyssey. - Pour les roches et minéraux industriels, les recherches menées en convention avec la société espagnole TOLSA, S.A. ont permis d’identifier et de mettre en exploitation le gisement de bentonite d’Afrah et de délimiter le gisement de Tizza (province de Nador). Dans la région d’Oulmès, le gisement de kaolin d’Aklay a été découvert et mis en promotion. La recherche des argiles céramiques entreprise avec la société italienne Caolino-Panciera dans la région d’Ezhiliga a été étendue aux secteurs des Rehamna, Ben Ahmed et d’Akrach. Sur le plan des cessions de projets miniers, les années 2004 et 2005 ont connu la signature de trois conventions pour la cession des gisements de calcite de Jbel Mahdi à la société OMYA S.A, de sables siliceux de Dar Chaoui à la société SONSIT et du gisement d’étain d’Achmmach au profit de la société australienne Kasbah Ressources.

Hamid Dadès

Mis en ligne le 25 juin 2006, http://www.lereporter.ma/

Hydrocarbures : nouveaux défis, nouvelles alliances

Alexandre Adler, Historien, éditorialiste au Figaro.
Le Figaro, 26 juin 2006, (Rubrique Opinions)

Comment la hausse des prix de l’énergie va-t-elle modifier les rapports de forces dans le monde ? Pour répondre à cette question, Le Figaro ouvre ses colonnes à des experts et à des dirigeants. Aujourd’hui, l’historien Alexandre Adler, éditorialiste au Figaro.

Toute marche arrière est impossible. Nous entrons à marche accélérée dans l’après-pétrole. On sait que de grands changements interviennent généralement sous l’effet de plusieurs causes qui jouent ensemble ; mais, le plus souvent, certaines de ces déterminations sont plus impératives que d’autres. Ici, cas extrême, toutes les flèches vont dans le même sens : réchauffement atmosphérique ; montée en puissance de la Chine, bientôt de l’Inde ; transformation inévitable de la technologie et des modes de vie ; et, enfin, dépendance désormais insoutenable à l’égard d’une région du monde – le golfe Persique – dont l’instabilité politique est inscrite pour longtemps dans la fragilité interne ou externe des Etats pétroliers qui le bordent. Autrement dit, le monde s’apprête à faire face à une demande croissante d’hydrocarbures. A mesure que d’autres gisements comme ceux de la mer du Nord s’épuisent, les réserves principales se retrouvent, comme en 1950, concentrées dans une même région, le Moyen-Orient, avec deux différences essentielles : l’instabilité régionale, qui échappe à tout contrôle durable, et l’impérieuse nécessité de diminuer la consommation pour ralentir le réchauffement de la planète. Dès lors, les conséquences de toute nature, depuis les relations les plus fondamentales entre États jusqu’au tissu le plus banal de notre vie quotidienne, peuvent d’ores et déjà être déduites ; elles sont – on le constatera – peu banales, et même souvent paradoxales. Pour nous borner à la géopolitique au sens restreint des rapports entre grandes entités de puissance, il suffit d’avoir en tête les actuels bouleversements pour en tirer des conclusions très inattendues. Il est hors de question que la Chine puisse négocier de véritables prix politiques à la baisse chez ses fournisseurs de l’Opep. Il est difficile à la Chine d’atteindre très rapidement un niveau de productivité des facteurs qui lui offre de réduire sa facture énergétique plus vite que l’extension en volume de sa croissance ne le permettra. Ainsi s’établit le rapport le plus fondamental du monde de demain : l’inévitable dépendance où se trouve la Chine à l’égard d’une conjoncture mondiale maîtrisée qui rende possible, tout à la fois, une croissance suffisante de ses principaux partenaires commerciaux – lesquels se trouvent durablement en Occident – et surtout une stratégie de plafonnement des prix qui ne peut être qu’identique à celle des États-Unis. Pékin, au rebours de son discours explicite, ne pourra vouloir que l’affaiblissement de l’Opep et le progrès rapide des solutions énergétiques alternatives : gaz liquide russe, mais aussi carburants végétaux et centrales nucléaires antisismiques nombreuses. Si, donc, la Chine se trouve dans le même bateau que l’Ouest et non celui du Sud et de l’Est, la hausse constante du prix du pétrole la rendra nécessairement plus proche de Washington, de Tokyo et de Bruxelles. Malheureusement, ce constat, inévitable à moyen terme, peut aussi être établi après une période de crispation dangereuse qui aura démontré – mais à un prix élevé – l’impossibilité pratique d’un retour de la Chine au tiersmondisme. La deuxième conséquence, totalement imprévue jusqu’à présent, c’est l’européanisation du modèle de croissance américain. Quels que soient les progrès impressionnants des carburants dérivés de l’éthanol (une nouvelle percée technologique, pour l’instant encore trop coûteuse, peut fournir un carburant d’origine végétale à l’efficacité à 90 % équivalente à celle de l’essence) et quelles que soient les perspectives encourageantes d’un traitement pétrochimique des immenses réserves des sables bitumineux, la correction de tir la plus rapide et la plus rentable à court terme, c’est tout de même une remodélisation des transports au profit de TGV à la française – pour commencer au Texas de Georges Bush ? –, de centrales nucléaires modernisées où Areva a déjà conquis d’importantes parts de marché et de centres urbains piétonniers desservis par des transports en commun performants. En bouleversant les données de sa demande intérieure, l’Amérique ne peut aller que vers un développement moins individualiste, plus solidaire des territoires et des activités. L’hégémonie conservatrice du Parti républicain fondée sur l’intime alliance du Big Oil et des Big Three de l’automobile, à Detroit, a déjà vécu. Avec elle, évidemment aussi, l’alliance saoudienne, dans une période où la Chine ne demande qu’à se substituer aux Etats- Unis auprès de Riyad. Si l’on ajoute à ces deux facteurs imprévus, deux autres beaucoup plus prévisibles, la remontée sur la scène mondiale d’une Russie superpuissance gazière et le renforcement de l’intérêt du reste du monde pour le golfe Persique, on aboutit à des schémas assez contraignants à court terme. Le bon sens voudrait que l’Europe entière s’affranchisse à grandes enjambées de sa dépendance moyen-orientale en lui substituant un partenariat permanent avec la Russie. Nous n’y sommes pas, en raison des méfiances des uns et du ressentiment des autres – les Russes –, qui ont eu le sentiment unanime que nous leur avons manqué au moment le plus dur de leur transition. Une politique européenne prudente se devra donc d’associer Moscou plus étroitement au destin du reste de l’Europe. S’agissant du Moyen- Orient enfin, il serait souhaitable de bannir aussi radicalement l’esprit de capitulation devant les pétromonarchies et les pétrothéocraties que l’esprit de bataille qui, en militarisant le golfe, troublera définitivement l’économie mondiale. Là, il faudrait inventer l’équivalent pour le Moyen-Orient de ce que fut pour la guerre froide la théorie du containment, en ranimant l’inspiration des grands théoriciens rooseveltiens, George Kennan et Dean Acheson : ne pas provoquer de troubles mais, par une pression constante et purement défensive, contraindre les États de la région à favoriser un commerce équitable avec le reste du monde. Et il ne serait pas du tout déconseillé d’intégrer dans cette stratégie nouvelle, les puissances émergentes ou réémergentes : la Russie, la Chine, l’Inde. Décidément, Spinoza avait encore une fois raison, personne ne saurait durablement se penser comme « un empire dans un empire ».

lundi, juin 26, 2006

Brûlage de gaz dans le monde c'est 75% des exportations de gaz de Russie

Brûlage de gaz dans le monde c'est 75% des exportations de gaz de Russie - 22 juin 2006 - 08:05 (Par Pierre Melquiot)

Chaque année, selon la Banque mondiale, environ 150 milliards de m3 de gaz naturel partiraient en fumée. Ce volume équivaut à un quart du volume de gaz utilisé aux États-Unis en un an, 30% de la consommation annuelle de gaz de l'Union européenne (UE), ou encore 75% des exportations de gaz de Russie.

Le brûlage du gaz naturel (ou torchage) est habituellement considéré comme une façon à la fois sûre et efficace de se débarrasser du gaz naturel associé à la production pétrolière. Mais, comme l'explique la Banque mondiale, cette pratique présente deux inconvénients majeurs, « elle contribue à augmenter les émissions de gaz de serre de la planète, et elle constitue un gaspillage flagrant d'une ressource d'énergie de grande valeur. »

Pour Bent Svenson, de la Banque mondiale, le cas de l'Afrique illustre de façon particulièrement frappante ce gaspillage de ressources. « Si l'on prenait le gaz qui est torché en Afrique, ce qui ne représente que 40 milliards de m3 par an, et qu'on l'utilisait pour créer de l'électricité produite par des centrales modernes et efficaces, on pourrait doubler la production électrique de l'Afrique subsaharienne, à l'exclusion de l'Afrique du Sud. », dit-il

Bent Svenson est le directeur pour la Banque mondiale du Global Gaz Flaring Reduction Partnership, un Partenariat public privé pour la réduction des volumes de gaz torché ou rejeté dans l'atmosphère (GGFR). Ce partenariat, initié par la Banque mondiale en août 2002, réunit les secteurs public et privé. Son objectif est d'aider les efforts des gouvernements et des compagnies pétrolières en vue de réduire le montant du gaz torché chaque année dans le monde. Ses membres comprennent des représentants des gouvernements des pays producteurs de pétrole, ainsi que de toutes les principales compagnies pétrolières internationales, et des compagnies d'état.

« Réduire le torchage demande un effort global et concerté de la part des gouvernements et de l'industrie, ainsi que de la part des institutions financières et des communautés locales, » signale Rashad Kaldany, Directeur du département pétrole, gaz, mines et produits chimiques du groupe de la Banque mondiale, et Président du Comité de pilotage du GGFR.

Ainsi, cette semaine, des représentants de ce partenariat se réunissent à Washington, DC, avec pour objectif de poursuivre leurs travaux au-delà de 2006. « Le partenariat du GGFR nous a aidés à forger une nouvelle vision du gaz associé à la production pétrolière : nous ne voyons plus en lui un coût inéluctable imposé par la nature, mais une opportunité, » déclare Bernard Legris, Conseiller technique de la compagnie pétrolière Total. « Il est fondamental de comprendre que donner une valeur au gaz associé à la production pétrolière constitue un changement d'esprit radical. En pratique, c'est comme si nous passions de l'ère du pétrole à celle du gaz. »

Le torchage a un impact climatique indéniable, et c'est un incroyable gâchis à l'heure de la raréfaction des ressources énergétiques classiques, il est donc nécessaire de réduire sa pratique. « Historiquement, on a toujours brûlé le gaz associé à l'extraction du pétrole, » explique M. Svenson. « ce qui est normal, vu que le gaz est mélangé au pétrole dans les champs pétrolifères. Mais dernièrement, la nécessité d'éviter de gaspiller des ressources et de nuire à l'environnement est devenue une préoccupation prioritaire. »

« Les 150 milliards de m3 de gaz naturel qui sont torchés chaque année ont un impact climatique important, » ajoute-t-il. Selon Svenson, l'arrêt du torchage ferait baisser de 13% le montant total des émissions de dioxyde de carbone que les pays se sont engagés à réduire au titre du Protocole de Kyoto pour la période 2008-2012.

Mais l'un des principaux obstacles à la réduction du torchage est le manque d'infrastructures et de marchés pour la vente des gaz associés. « Une grande partie du pétrole est produite dans des zones éloignées, et souvent même off-shore, donc loin des marchés où le gaz associé pourrait être consommé. La vente de ce gaz implique donc des investissements d'infrastructure importants, et nous devrons travailler avec l'industrie et les gouvernements concernés pour rendre les investissements dans ce type d'infrastructure les plus attractifs possibles, » explique M. Svenson.

Svenson ajoute que le supplément d'investissement n'est pas le seul obstacle qui freine l'utilisation du gaz associé. « Tout d'abord, il y a des problèmes liés aux réglementations et contrats actuels qui ont trait à l'utilisation de ce gaz. Les contrats pétroliers actuels ne stipulent pas toujours qui est le propriétaire du gaz et, par conséquent, qui peut l'utiliser. L'autre problème important a trait au fait que les projets d'utilisation du gaz sont souvent marginalement économiques, de sorte que nous devons travailler avec l'industrie et avec les gouvernements pour améliorer l'économie de ces projets. Les outils que nous sommes en train d'étudier comprennent le financement du crédit carbone de façon à rendre ces projets économiquement viables. »

En bref, le succès et la viabilité de projets de réduction du torchage dépendent de l'existence de conditions adéquates et d'incitatifs, tels des incitatifs fiscaux, des investissements en infrastructure, la disponibilité des marchés, de réglementations appropriées qui permettent l'utilisation du gaz et, bien sûr, de la volonté politique.

Il précise que « le torchage concerne relativement peu de pays dans le monde, et la plupart d'entre eux sont aujourd'hui membres du partenariat. Notre partenariat contrôle en quelque sorte plus de 50% du torchage dans le monde. Le secrétariat de l'OPEC est également un de nos partenaires, et grâce à lui nous avons accès à 25% d'autres pays qui pratiquent le torchage. »

Aujourd'hui, 17 projets de démonstration fonctionnent dans les pays partenaires. « Ces projets appartiennent à 2 catégories. La première contient des projets de commercialisation où nous facilitons l'engagement des actionnaires des différentes parties de façon à rendre les projets viables. La deuxième catégorie a trait au financement du carbone, où nous essayons, avec les partenaires, de développer des moyens pour permettre aux projets de réduction du torchage d'avoir accès au crédit carbone. »

L'objectif de la réunion du Comité de pilotage cette semaine sera d'évaluer les résultats accomplis jusqu'à ce jour, et d'envisager les pistes de recherche pour des trois prochaines années pour réussir à convaincre plus de partenaires à réduire de façon substantielle le montant du gaz brûlé dans le monde.

Or noir : La ruée vers le Maroc

Suite aux nouvelles signatures de contrats, le domaine minier de l’ONHYM compte désormais 18 accords pétroliers et 6 contrats de reconnaissance en collaboration avec 22 partenaires. Ces accords et contrats régissent une superficie totale de 273.529,20 km2 réparties sur 10 concessions d’exploration, 86 permis de recherche, dont 15 Onshore et 71 Offshore, ainsi que 6 autorisations de reconnaissance Onshore.

Transatlantic Petroleum obtient le permis de Tselfat

LA compagnie canadienne "TransAtlantic Petroleum" vient d’obtenir le permis de la zone dite Tselfat, située dans les rides prérifaines. Associée à l’Office National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM) qui détient une participation de 25 %, la compagnie disposera avec ce bloc d’opportunités d’exploration de structures profondes, non encore testées, similaires à celles productives connues suite aux travaux dans le passé, et de possibilités de développement de gisements modestes déjà découverts. Le permis compte les gisements de Haricha, de Tselfat et de Bou Draa, découverts respectivement en 1919, en 1934 et au début des années cinquante. Ces champs avaient été producteurs entre les années 1920 et 1970 pour l’essentiel avec un débit relativement limité jusque dans les années 1990. Bien que les estimations soient difficiles, il est probable que leur production cumulée ait totalisé onze millions de barils de pétrole et 210 millions de m3 de gaz naturel. TransAtlantic Petroleum réalisera, de plus, un levé de sismique 3-D qui couvrira Haricha et Bou Draa et devrait forer, sur cette base, un puits d’exploration pour tester des formations du Jurassique non encore explorées. Transatlantic est déjà présente au Maroc dans le cadre de l’autorisation de reconnaissance dite Guercif-Beni Znassen.

Un chypriote à l’assaut du Gharb

Un accord pétrolier et un contrat de reconnaissance ont été signés entre l’ONHYM et la société d’hydrocarbures chypriote Cabre Maroc Limited. Cet accord porte sur les permis "Rharb Sud" et "Rharb Centre". D’une durée de validité initiale de trois ans, l’accord prévoit l’exécution de plusieurs puits d’exploration dont deux seront forés avant la fin de 2006. Par ailleurs et afin de mieux évaluer le potentiel en hydrocarbures de la zone dite "Fès", Cabre Ltd et l’ONHYM ont signé également un contrat de reconnaissance aux termes duquel cette société va mener des études de synthèses relatives à ladite zone.

Le deuxième malais dans l’Offshore

L’Office National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM) vient d’accorder au groupe malais Genting Oil & Gas le permis Ras Juby, au large de la ville de Tarfaya qui recèle la découverte d’huile lourde de Cap Juby, effectuée par ExxonMobil. En vertu de cette convention Genting s’engage à exécuter, au cours de la période initiale de validité d’une durée de2 années, l’acquisition d’une campagne de sismique 3D. Cette campagne sismique va permettre à cette société de mieux apprécier et de développer, en cas de rentabilité économique, le potentiel d’huiles lourdes déjà découvert lors des forages entrepris par la compagnie Exxon dans la structure Cap Juby à la fin des années 1960.

Deux Américains explorent la zone "Asilah-Ouazzane et Tissa"

L’OffIce National des Hydrocarbures et des Mines (ONHYM) et les sociétés américaines Direct Petroleum Morocco Inc et Anschutz Morocco Corporation ont prorogé le contrat pour la reconnaissance et l’évaluation du potentiel pétrolier de la zone "Asilah-Tissa" (onshore). Ce contrat donne aux deux entreprises américaines, dénommées DPAC, l’autorisation de reconnaissance exclusive dans la zone d’intérêt "Asilah-Tissa", située en onshore du Pré-Rif sur une superficie de 12.836 km2. Les sociétés Direct Petroleum Morocco Inc et Anschutz Morocco Corporation, partenaire de l’ONHYM, opérant dans le cadre de l’autorisation de reconnaissance dite "Asilah-Tissa", ont effectué une campagne de sismique 2D et des travaux de terrain qui ont abouti à la définition de plusieurs prospects potentiels. Actuellement ces sociétés entreprennent des travaux complémentaires pour mieux apprécier et minimiser les risques géologiques au niveau des prospects définis.

Et Direct Petroleum teste sa nouvelle technologie

Suite à la mise en évidence de prospects dans la zone Azilah, la société américaine, Direct Petroleum, va utiliser une méthode de sismique non conventionnelle, pour mieux cerner les prospects définis.

Hamid Dadès

Mis en ligne le 25 juin 2006

Source : http://www.lereporter.ma

dimanche, juin 25, 2006

Opinion : Le pétrole victime du nationalisme

par Eric Le Boucher
LE MONDE | 24.06.06


Etes-vous complètement rassurés sur l'avenir de l'Arabie saoudite ? Etes-vous serein devant les déclarations belliqueuses du président iranien Mahmoud Ahmadinejad ? Etes-vous franchement confiant dans la politique de nationalisme énergétique que mène Vladimir Poutine en Russie ? Etes-vous totalement insensible à la poussée populiste au Venezuela comme en Bolivie ?



Ces pays sont les grands producteurs d'hydrocarbures. Le prix du baril, la rareté de l'or noir, l'approche du redouté peak oil (le moment où la production mondiale commencera à décliner inexorablement) ont mis dans la tête de leurs dirigeants, ou de ceux qui veulent leur place, comme les partis islamiques, que le pétrole était une manne mais que c'était surtout une arme. Faisant face chacun à des résultats économiques peu flatteurs et/ou des tensions sociales fortes, ils ont très envie de l'utiliser.

Le pétrole n'est pas seulement devenu cher. Il est devenu incertain. Il suffit, dans le contexte de tensions que l'on traverse, qu'un seul de ces dirigeants mette la main sur le robinet, et c'est la crise économique mondiale assurée. Finies vos belles vacances en automobile...

Fragilisés, les pays consommateurs ont le choix entre deux attitudes. Soit l'intervention musclée pour rétablir "une sécurité d'approvisionnement". C'est ce qui s'est passé souvent dans les temps anciens et encore contre Saddam Hussein pendant la première guerre du Golfe. Mais aujourd'hui, si cette voie militaire n'est pas fermée, elle est très compromise. La deuxième guerre d'Irak a montré que même la puissante armée américaine n'est pas parvenue à normaliser l'extraction pétrolière dans les champs irakiens. Les contre-effets sont, eux, démontrés : coûts militaires dantesques pour les Américains, dynamisation des terrorismes, source inépuisable de rancoeurs entre l'Orient et l'Occident.

L'autre attitude consiste à se rassurer en pensant que les dirigeants des pays producteurs sont dotés de raison : en fermant le robinet, ils se privent de recettes et font le malheur de leur peuple. L'arme pétrolière est une arme de dissuasion qui ne s'emploie que comme menace jamais mise à exécution. Le confort de cette voie pacifique est aujourd'hui malheureusement triplement bousculé. 1) par le précédent de l'Ukraine, où Poutine a mis à exécution un embargo de gaz parce que ce pays ne payait pas assez cher, mais surtout parce qu'il faisait les yeux doux à l'Ouest. 2) par la Chine dont on doute de la solidarité en cas de crise. 3) par l'évolution de la planète pétrolière. En 1960, les compagnies occidentales (les majors) avaient accès à 85 % des ressources du globe. Aujourd'hui, cette proportion est tombée à 16 %. Le reste du pétrole dépend des firmes nationalisées (Aramco, Gazprom, Petroleos de Venezuela...) dont le seul PDG est le chef de l'Etat.

Le pétrole n'a jamais été une matière première comme les autres, mais elle est aujourd'hui plus politique qu'elle ne le fut jamais en temps de paix. Ce nationalisme pétrolier a pour effet d'affaiblir le pouvoir de négociation des pays consommateurs. Mais il a aussi un désastreux effet prix : la politisation pousse à restreindre ou à conditionner sévèrement l'appel aux technologies et aux savoir-faire occidentaux. Résultat : depuis 1998, avant qu'Hugo Chavez ne prenne le pouvoir, la production de brut de son pays a diminué de 46 %. Celle de l'Iran est tombée de 7 millions de barils par jour à 4 millions. Au total, la perte de production potentielle atteint 7,8 millions de barils par jour, autant que la consommation réunie de l'Allemagne, la France, l'Italie et l'Espagne, estime Julian Lee du CGES (Centre for Global Energy Studies) de Londres. Ne demandez plus pourquoi le prix du baril flambe à 75 dollars...

La sécurité énergétique sera au coeur des discussions du G8, qui se tiendra en juillet dans la ville de Poutine, Saint-Pétersbourg. C'est dans cette perspective que Peter Mandelson, le commissaire européen au commerce, a fait, vendredi, dans une interview au Wall Street Journal, une proposition qui pourrait changer les rapports de force : inscrire l'énergie à l'OMC (Organisation mondiale du commerce) au même titre que les autres produits, les T-shirts et les haricots. Cela signifierait que le transit dans un pays est un droit absolu (pas touche aux pipelines), que les investissements seraient protégés et que les litiges pourraient être tranchés à Genève.

Pour l'heure, il ne s'agit que d'une idée lancée par l'ancien brillant conseiller de Tony Blair. Rien encore à l'agenda de l'OMC ou du G8. Mais ce serait redonner aux pays consommateurs de quoi parler d'égal à égal avec les pays producteurs. L'entrée dans l'OMC - la Russie est candidate - donne des avantages, elle donnerait le devoir de poser un regard normalisé sur le pétrole et le gaz. En échange, ajoute Peter Mandelson, Gazprom pourrait, dans ces conditions, être autorisé à acheter des circuits de distribution de gaz en Europe, intégration qui aujourd'hui inquiète à juste titre.

L'or noir verrait sans doute son beau statut dégradé mais ce serait in fine protéger les pays producteurs, lisez les peuples, des sottises glorieuses du nationalisme.




ÉRIC LE BOUCHER
Article paru dans l'édition du 25.06.06

lundi, juin 12, 2006

Opinion : La Bolivie nationalise ses hydrocarbures

La Bolivie nationalise ses hydrocarbures

Source : La Gauche, mensuel du Parti ouvrier socialiste (www.sap-pos.org), Bruxelles, juin 2006.

Le gouvernement bolivien vient de nationaliser les hydrocarbures le 1er mai dernier, la « troisième et dernière nationalisation », a affirmé le président Evo Morales. Le pays le plus pauvre d’Amérique du Sud semble s’être décidé à entamer par la réforme un processus de réversion des politiques néolibérales imposées dans les années 90 en commençant par nationaliser les richesses de son sous-sol.

par Frédéric Lévêque
1er juin 2006

On s’en doute, la mesure de nationalisation des hydrocarbures n’a pas plu à tout le monde et suscite de vives polémiques et critiques mettant à mal les principes d’égalité entre Etats et leur souveraineté. Plaintes, condamnations, inquiétudes, demandes de dialogue, de concertation et de sécurité juridique pour les investisseurs émanent de divers gouvernements et entreprises du secteur. Nombreux sont les éditorialistes à dénoncer l’ombre de Chavez dans cette réforme, le président vénézuélien jouant aujourd’hui le rôle d’épouvantail qui était réservé il n’y a pas si longtemps à Moscou ; une manière de mépriser l’ « indien » Evo Morales et surtout la majorité de la population bolivienne qui dans la rue (octobre 2003, mai-juin 2005) ou lors d’un référendum (juillet 2004) s’est prononcée pour une telle mesure de nationalisation et a envoyé l’ancien syndicaliste des cultivateurs de coca au Palacio Quemado - le palais présidentiel - pour qu’elle soit mise en oeuvre.

Retour sur la « capitalisation »
Après une période troublée marquée par les mobilisations sociales et l’instabilité politique, la Bolivie a retrouvé la démocratie en 1982, devançant ainsi ses voisins sud-américains dans leur processus de libération du joug militaire. Mais ce retour à la démocratie représentative fut presque concomitant à la mise en œuvre de politiques néolibérales, à partir de 1985, avec l’introduction de la « Nouvelle politique économique », un programme qui, selon le Fonds monétaire international (FMI), « rompit avec la tradition vieille de décennies de ’capitalisme d’Etat’ de la Bolivie ». A l’exception d’une période de huit mois, la Bolivie s’est « mal développée » sans interruption sous le joug du FMI au cours des vingt dernières années. C’est cette même institution qui poussa le gouvernement de Gonzalo Sanchez de Lozada, en 1996, à « capitaliser » le secteur des hydrocarbures. Il fallait attirer les investisseurs étrangers et transformer l’appareil de production pour l’orienter vers les exportations. Le slogan à la mode était « exporter ou mourir ».

Pour parler de la privatisation des services publics en Bolivie, on utilise le terme de « capitalisation ». De quoi s’agit-il ? Selon le FMI, « la capitalisation était un modèle de privatisation conçu pour garantir un niveau minimal d’investissement étranger plutôt que pour maximiser des revenus de privatisation » [1]. Ce processus consistait à transformer l’entreprise publique en sociétés par actions, dont au moins la moitié étaient acquises par le capital international et le reste étant attribués aux « citoyens boliviens », notamment à travers des fonds de pension. Une fois capitalisées, les anciennes entreprises publiques établissaient des joint ventures avec des transnationales qui devaient s’engager à y investir l’équivalent de la valeur des actions. Donc, la capitalisation a consisté non pas à vendre mais à donner le contrôle d’entreprises publiques au capital international en échange de rien, à l’exception d’argent frais.
Le nouveau cadre juridique adopté en 1996 par le gouvernement de l’époque - loi 1689 et décret suprême 24806 - changea donc radicalement la donne. La loi antérieure (1990) affirmait que « l’État est [était] propriétaire des réserves, de la production et de la commercialisation, et par conséquent participait à et était le bénéficiaire direct de la génération, de la distribution et de l’usage de l’excédent », nous dit Carlos Villegas [2]. En revanche, la nouvelle législation imposée en 1996 indiquait que « l’État est propriétaire des réserves de gaz mais pas de la production et de la commercialisation des liquides et du gaz, et par conséquent est exclu du circuit de la génération, de l’appropriation et de l’usage de l’excédent ».

La nouvelle législation établissait aussi une nouvelle classification des champs d’exploitation. « L’État créa deux catégories d’impôts distincts. L’un, portant sur les réserves dites « existantes », qui maintenait les royalties à 50% de la valeur de la ressource, et l’autre, sur les réserves « nouvelles », qui abaissait les royalties à un niveau de 18% de la valeur marchande. En 2000, 95% des réserves étaient homologuées selon le nouveau régime de royalties. » [3] Le problème est que les puits déjà en exploitation étaient en cours d’épuisement tandis que les nouveaux furent essentiellement découverts et mis en exploitation après la privatisation, à partir de 1997. Ce sont ces derniers qui ont hissé la Bolivie au rang de seconde réserve de gaz naturel d’Amérique du Sud, après le Venezuela.

Avant ces contre-réformes, l’entreprise publique YPFB (Yacimientos Petroliferos Fiscales Bolivianos) était l’entité chargée d’exploiter et de commercialiser cette ressource. Des transnationales opéraient dans le pays mais sous le contrôle de YPFB qui apportait 400 millions de dollars par an au Trésor public. « Un bon pourcentage des profits de cet organisme public revenait à l’Etat central pour financer principalement les dépenses courantes des divers gouvernements », écrit Walter Chavez [4]. « Le secteur des hydrocarbures était la « caisse à tout faire » de l’Etat mais en contrepartie de ne pas se perfectionner au niveau technologique et de ne s’occuper que d’activités purement extractives, sans investir dans de nouvelles explorations. » Après la « capitalisation », l’entreprise, jugée et « rendue » inefficiente, fut désarticulée et ses fonctions réduites à l’administration de contrats.

Guerres du gaz
Depuis l’entrée dans le 21e siècle, la contestation sociale n’a cessé de croître en Bolivie. En octobre 2003, la volonté du gouvernement et du consortium transnational LNG Pacific d’exporter le gaz bolivien vers le Mexique et la Californie via un port chilien déclencha une rébellion qui, malgré les dizaines de morts de la répression, prendra, au bout de quinze jours de manifestations et de blocages de routes, la forme d’une insurrection qui poussa le président Gonzalo Sanchez de Lozada à prendre la fuite, direction les Etats-Unis. C’est à partir de cet épisode que les mouvements sociaux vont brandir l’étendard de la nationalisation des hydrocarbures, une revendication qui fait partie de l’imaginaire syndical et populaire du pays.Suite à la guerre du gaz, c’est au tour de l’ancien journaliste Carlos Mesa de prendre les commandes du pays, en s’engageant notamment à organiser un referendum et à faire adopter une nouvelle loi sur les hydrocarbures. Cet enjeu pèsera sur tout son mandat. « La réalisation du référendum sur le gaz de juillet 2004 (...) comme acte de contention et de neutralisation, représenta une déroute temporaire de la revendication de nationalisation », nous dit Alvaro Garcia Linera, l’actuel vice-président. « Les secteurs qui défendaient cette revendication ne sont pas arrivés à organiser le boycott du référendum », ce qui a centré et légitimé le débat sur la seule augmentation des impôts et royalties. « Cependant, l’enlisement du débat au parlement [sur une nouvelle loi des hydrocarbures] et l’absence de signaux de transition vers un nouveau modèle économique, avec un rôle accru de l’Etat dans le commerce des hydrocarbures, a recréé une situation de mal-être social et a renforcé l’exigence de nationalisation ». En mai et juin 2005, face à un nouveau blocage du pays par les mouvements sociaux, Mesa fut poussé à la démission ouvrant la voie à des élections anticipées qui ont vu triompher Evo Morales en décembre dernier.

La nationalisation
Le 7 avril 2005, le Tribunal constitutionnel affirmait que les 78 contrats existant entre l’Etat bolivien et les transnationales dans le domaine des hydrocarbures étaient illégaux, notamment parce qu’il n’avaient pas été approuvés par le Parlement. Pour de nombreux secteurs, l’ordonnance du tribunal équivalait à une virtuelle nationalisation. Cette dernière sera officialisée un an plus tard avec le décret suprême 28701 appelé « Héros du Chaco » en référence à la guerre contre le Paraguay (1932-35). Le décret rend notamment à l’Etat la propriété et le contrôle des hydrocarbures, ordonne que toute la production revienne à YPFB et établit une période de 180 jours pour la renégociation des contrats des compagnies étrangères selon les nouvelles normes en vigueur, après audit et au cas par cas.

La nationalisation soumet le capital étranger mais ne l’exproprie pas. Elle rééquilibre la relation entre les entreprises et l’Etat en faveur de ce dernier. Du fait des particularités de la privatisation du secteur - la capitalisation - sont transférées à titre gratuit à YPFB les actions détenues par les « citoyens boliviens » et sont « nationalisées » les « actions nécessaires » des consortiums d’entreprises transnationales (Andina, Chaco, Transredes, etc.) pour que l’entreprise publique YPFB contrôle un minimum de 50% + 1 des parts.

Depuis 1996, les entreprises privées étaient taxées à hauteur de 18 %. Suite à la nouvelle loi sur les hydrocarbures l’an dernier, ce pourcentage a grimpé à 50% Il sera maintenu pour les champs d’exploitation les moins importants, mais augmenté à 82%- l’inverse de la situation prévalant avant mai 2005 -pour les deux champs les plus productifs, à savoir Sábalo et San Alberto, qui représentent 70% de la production nationale.

Avant la capitalisation, les entreprises publiques (hydrocarbures, télécommunications, lignes aériennes et chemins de fer) représentaient 60% des revenus du gouvernement. Après l’entrée en vigueur de la loi de capitalisation et la coûteuse privatisation du système des pensions, la situation fiscale s’est fragilisée. L’Etat bolivien a accru sa dépendance envers les crédits et les dons de l’étranger et la collecte d’impôts. Actuellement, les investissements publics représentent 7% du PIB et seuls 50% sont financés avec des ressources internes. Selon des estimations du ministère du Développement économique, l’Etat bolivien a perdu 3,152 milliards de dollars entre 1996 et 2006, ce qui signifie que pour chaque dollar que recevait l’Etat, il en perdait deux [5]. Par la nationalisation, le gouvernement entend recevoir 300 millions de dollars additionnels par an et ainsi engranger des royalties d’environ 780 millions de dollars. Il entend aussi, par un « geste fort », respecter le mandat qui lui a été donné en décembre dernier.
Pour mener à bien ce processus, Evo Morales pourra compter sur les alliés cubain et vénézuélien, l’axe « radical » de la gauche sud-américaine. C’est ainsi qu’il vient de rejoindre l’Alternative bolivarienne pour les Amériques (ALBA), un projet d’intégration basé sur la coopération, la solidarité et la complémentarité entre pays lancé par le président vénézuélien. C’est dans une telle initiative anti-impérialiste que « el Evo » trouvera des alliés pour faire face aux projets libre-échangistes, aux pressions internationales et au capital européen, états-unien mais aussi et surtout brésilien. En effet, 51% du gaz consommé par le Brésil provient de son bouillant voisin et l’entreprise brésilienne Petrobras - publique à 37% -contrôle 20% du PIB de la Bolivie.Jusqu’ici la Bolivie a plus subi l’exploitation de ses ressources naturelles qu’elle n’en a profité. Après l’argent des mines de Potosi, à l’époque de la Colonia, et celles d’étain, le pays va-t-il enfin pouvoir utiliser rationnellement et durablement ses richesses au profit de sa population ?

Notes:
[1] Fonds monétaire international, Bolivia : Ex Post Assessment of Longer-Term Program Engagement-Staff Report and Public Information Notice on the Executive Board Discussion, avril 2005.
[2] Carlos Villega Quiroga, Rebelión popular y los derechos de propiedad de los hidrocarburos, OSAL n°12, septembre-décembre 2003.
[3] Louis-F. Gaudet, La Bolivie de l’après référendum : vers un nouveau cycle de contestations ?, RISAL, 10 septembre 2004.
[4] Walter Chavez, la lutte pour la nationalisation des hydrocarbures, RISAL, juin 2005.
[5] Cité dans “Repsol YPF en Bolivia : una isla de prosperidad en medio de la pobreza”, rapport de Intermón Oxfam. Mai 2004.

Algérie : Où va l’argent des hydrocarbures

Source : Le Monde diplomatique, avril 2006 - Page 8
Par Jean-Pierre Seréni
Journaliste, auteur (avec Ania Francos) d’Un Algérien nommé Boumediène, Stock, Paris, 1976.



Difficile réconciliation nationale en Algérie
Où va l’argent des hydrocarbures

Des ressources pétrolières qui débordent, un pays de plus en plus riche, une population de plus en plus pauvre, peu de grands travaux. Comment expliquer ces paradoxes ?

Par Jean-Pierre Seréni
Journaliste, auteur (avec Ania Francos) d’Un Algérien nommé Boumediène, Stock, Paris, 1976.


Huit milliards de dollars en 1998, 13 milliards l’année suivante, 32 milliards en 2004, près de 45 milliards l’an dernier, autant et sans doute plus cette année : l’Algérie n’en finit pas, comme ses grands partenaires de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), d’engranger des montagnes de dollars. Le quatrième choc pétrolier, survenu peu après la fin de la guerre éclair américaine en Irak, à l’été 2003, dépasse par son ampleur et sa durée les trois précédents. Et efface du même coup les difficultés financières rencontrées par M. Abdelaziz Bouteflika à son arrivée à la présidence de la République algérienne démocratique et populaire au printemps 1999. « Les caisses sont vides, l’étranger n’a pas confiance en nous, la dette extérieure nous écrase, et les entreprises publiques gaspillent nos maigres ressources », s’alarmait alors l’un de ses proches. De passage à Alger en novembre 1999, M. Kemal Dervis, alors le « M. Monde arabe » de la Banque mondiale, conseille austérité et modestie : « Réduisez les grands projets en cours de 20 à 9, privilégiez l’agriculture, l’hydraulique et le filet social... »

On redoutait le trop peu et c’est le trop-plein ! Le problème n’est plus de trouver de l’argent pour relancer une économie en panne et pacifier une société déchirée par une sanglante guerre civile, mais d’utiliser au mieux ce pactole inattendu, en un mot de ne pas le gaspiller comme ce fut trop souvent le cas lors des précédents chocs pétroliers.

Lors du premier de ceux-ci, en 1973-1974, Alger ambitionne de devenir le Japon de l’Afrique et consacre son surplus à l’achat d’usines clés en main. Ses émissaires parcourent le monde industrialisé pour acquérir ce qui se fait de mieux – et souvent de plus cher. Acier, aluminium, engrais, papier, chimie, camions ont la priorité, les unités sont souvent implantées dans des régions déshéritées aux salariés peu qualifiés, guère familiers des technologies ultramodernes. Résultat, les retards s’accumulent, et le cycle pétrolier se retourne avant que l’industrie lourde soit en état de marche. L’héritage se révèle encombrant. Des sociétés nationales qui perdent de l’argent, des usines qui tournent au ralenti, et une dette extérieure qui explose parce qu’il a bien fallu emprunter pour financer les fins du programme d’industrialisation...

Au cours du deuxième choc, en 1979-1982, les dirigeants ont changé : le pâle Chadli Bendjedid, remplaçant du fier Houari Boumediène, court après une légitimité qui le fuit. L’argent du pétrole ira à un programme antipénuries (PAP) qui se traduit par un flot d’importations de produits de consommation. L’Algérien qui en a les moyens est à la fête : réfrigérateurs, télévisions, automobiles font leur apparition dans les vitrines des magasins d’Etat.

Le troisième choc, en 1991-1992, passe largement inaperçu de la majorité des habitants. Les 3 à 4 milliards de dollars supplémentaires récoltés servent à régler une partie des arriérés de paiement accumulés depuis le retournement du cycle pétrolier en 1984-1985. L’obsession d’Alger, au plan financier, est d’éviter de devoir rééchelonner sa dette extérieure, ce qui placerait son économie sous la houlette du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale. On préfère le « reprofilage », un arrangement discret avec le Crédit lyonnais qui implique de régler les impayés dus aux entreprises françaises. Il n’évitera rien du tout et, en avril 1994, en pleine vague terroriste, alors qu’il ne reste plus en caisse de quoi payer la cargaison de semoule d’un cargo qui tourne en rade d’Alger, un premier ministre de transition accepte le rééchelonnement de la dette extérieure et les conditions qui vont avec...

Onze ans après, l’Algérie affiche une insolente santé financière : les réserves officielles de devises dépassent 55 milliards de dollars et représentent plus de vingt-quatre mois d’importations ; le compte courant du Trésor public à la Banque centrale accumule l’équivalent d’une année de recettes fiscales non pétrolières ; la dette extérieure (16,4 milliards de dollars à la fin 2005, contre 24 milliards en 1990) n’est plus un souci.

Symbole de cette richesse inattendue, la compagnie nationale Sonatrach, détenue à 100 % par l’Etat, se place au douzième rang dans l’industrie pétrolière mondiale, truste les places de champion pour le gaz (second fournisseur de gaz naturel de l’Europe, derrière la Russie ; second fournisseur en gaz liquéfié GNL aux Etats-Unis...) et dispose d’une large palette de produits exportables en dehors du brut (condensat, GPL, produits raffinés, pétrochimie). Au fil des ans, elle a fait de plus en plus appel aux sociétés étrangères pour la seconder.

En 1986, quinze ans après les nationalisations et le départ des techniciens français, Alger entrouvre pour la première fois les portes du Sahara aux prospecteurs étrangers. Les premiers, et les plus nombreux, à se présenter sont de petites compagnies américaines dont la plus chanceuse, Anadarko, fait plusieurs découvertes majeures dans l’est du pays. Un nouveau pas est franchi en 1991, malgré de fortes oppositions. En 2000, quand le nouveau ministre de l’énergie propose une loi pétrolière qui « normalise » la Sonatrach et lui enlève ses pouvoirs quasi régaliens (la société percevait les impôts payés par les compagnies étrangères et délivrait à son gré les permis de recherche), l’exposant ainsi à la concurrence, c’est la bronca ! Son PDG démissionne, le syndicat manifeste, et le pouvoir recule. Ce n’est qu’en 2005 que la loi est adoptée.

Le grand écart entre la pluie de pétrodollars et un quotidien plus que difficile fait enrager une partie de la population : barrages routiers, occupations ou incendies d’édifices publics, séquestrations d’élus et de fonctionnaires, manifestations violentes tournant souvent à l’émeute se sont banalisés. Pas d’eau, pas de courant, pas de logement, pas de travail, pas d’égouts, pas de routes, les griefs sont les mêmes d’un bout à l’autre du pays. Les millions de ruraux chassés de chez eux par l’insécurité dans les années 1990 et qui s’entassent dans les bidonvilles ne comprennent pas. Pourquoi l’Algérie est-elle riche et les Algériens pauvres ? Pourquoi, alors que le revenu par tête aurait augmenté de 31,3 % en deux ans, selon l’Office national des statistiques, le pouvoir ne fait-il rien d’efficace pour ces millions de jeunes en quête d’un toit et d’un emploi, sinon leur envoyer la police, dont les effectifs connaissent, eux, une spectaculaire progression (au moins 120 000 aujourd’hui, et 45 000 à recruter d’ici à 2009, contre une trentaine de milliers dans les année 1980).

Absence de cadres qualifiés et compétents
Pourquoi le pouvoir en est-il réduit à répondre par la répression à des besoins qu’il a, par ailleurs, les moyens de satisfaire ? Jusqu’ici, l’expansion budgétaire a été outrageusement privilégiée. Au printemps 2005, le gouvernement lance un programme complémentaire de soutien à la croissance économique (2005-2009) de 55 milliards de dollars, censé compléter un précédent plan de soutien à la relance économique adopté en 2001. La loi de finances 2006, votée en décembre 2005, témoigne de l’ampleur des moyens ; le budget d’équipement de l’Etat augmente de 28 % par rapport à celui de 2005 et fait plus que doubler par rapport à ce qui a été fait en 2004. Pour la première fois dans l’histoire financière de l’Algérie, il dépasse le budget de fonctionnement...

Et ce n’est pas fini. Le premier conseil des ministres tenu en janvier 2006 par le président Bouteflika, à peine rentré de convalescence à Paris, arrête un programme spécial de 5 milliards de dollars en faveur du Sud, qui sera suivi par d’autres en faveur des hauts plateaux, une zone traditionnellement déshéritée, et de la Kabylie, ruinée par plusieurs années de troubles.

Mais il y a loin des décisions budgétaires au démarrage des travaux, et plus encore à leur achèvement. Partout, le manque d’expertise ralentit l’investissement ; la difficulté n’est plus l’argent, mais la capacité à le dépenser. De nombreuses wilayas (départements) et d’encore plus nombreuses assemblées populaires communales (communes) ne consomment pas leurs crédits d’équipements, faute de cadres qualifiés et compétents. C’est pis dans certains ministères techniques (transport, équipement, hydraulique...), désorganisés par l’instabilité ministérielle et encombrés d’anciens programmes inachevés parfois plus de dix ans après leur lancement – voire vingt ans, comme le métro d’Alger ou la nouvelle aérogare de Dar-el-Beida. Trop souvent incapables de se hisser au niveau requis par des projets d’envergure, les entreprises du BTP incriminent la bureaucratie, les délais de paiement, la mauvaise volonté des fonctionnaires...

Face à une demande qui explose, l’offre reste encore très timide. Des voix isolées, à l’intérieur comme à l’extérieur, plaident pour une exécution plus mesurée du budget 2006, et proposent de consacrer une partie des crédits ainsi libérés au renforcement des autres intervenants de la vie économique et à la création d’activités nouvelles en dehors du secteur des hydrocarbures. Ce ne serait pas inutile tant les bureaucrates éclipsent les autres agents sociaux. Mais ces voix seront-elles entendues ?



http://www.monde-diplomatique.fr/2006/04/SERENI/13383 - avril 2006

lundi, juin 05, 2006

Argentine : pénurie d'énergie à répétition

Argentine : pénurie d'énergie à répétition
L. O.
Le Figaro, 02 juin 2006, (Rubrique International)

Sans relance de l'exploration, les réserves de gaz seront épuisées à l'horizon 2015.


LA CRISE économique qui a ravagé le pays au début de la décennie a bouleversé le marché de l'énergie dans ce pays qui dispose des troisièmes réserves de gaz du sous-continent. En gelant les tarifs, le gouvernement, soucieux de relancer l'activité économique, a clairement privilégié le marché intérieur aux intérêts privés qui préconisaient de continuer à exporter du gaz aux prix mondiaux. La faiblesse des investissements depuis 2002 a entraîné un plongeon de l'exploration, laissant craindre une rapide diminution des réserves. Or le gaz représente aujourd'hui 50% de la matrice énergétique de l'Argentine. En 2005, pour éviter la crise énergétique, Buenos Aires a dû importer du fioul vénézuélien pour ses centrales thermiques, diminuer ses exportations vers le Chili et augmenter ses achats de Bolivie. D'où l'urgence de stabiliser ses relations avec La Paz.

Sans relance de l'exploration, les réserves de gaz seront épuisées à l'horizon 2015.

Venezuela : le bras de fer permanent

Venezuela : le bras de fer permanent
Le Figaro, 02 juin 2006, (Rubrique International)

Hugo Chavez veut financer sa politique sociale.


LES NÉGOCIATEURS en ont des sueurs froides. Après avoir revu à la hausse la fiscalité des hydrocarbures et imposé les changements de statut dans l'exploitation de petits champs pétroliers, Hugo Chavez s'attaque à l'eldorado de l'or noir vénézuélien : la ceinture de l'Orénoque. La rive nord du fleuve Orénoque abrite le plus grand réservoir mondial de pétrole extra-lourd : 1 200 milliards de barils, dont au moins 240 milliards de barils sont jugés récupérables. En prenant en compte ce pétrole visqueux, à la consistance bitumineuse, le Venezuela dépasse de loin l'Arabie saoudite en terme de réserves.

L'exploitation, qui exige d'importants investissements technologiques, a été lancée il y a une dizaine d'années. Elle est pilotée par quatre associations stratégiques, dont Sincor, contrôlée par le français Total (en association avec la compagnie nationale vénézuélienne PDVSA et la norvégienne Statoil). Plus pour longtemps, laissent entendre les députés vénézuéliens.

Un premier texte, adopté par une commission spéciale de l'Assemblée nationale il y a deux semaines, demande que des «mesures politiques, administratives et pénales» soient prises à l'encontre des fonctionnaires qui ont mis en place ces associations stratégiques dans les années 90. Dans la foulée, un porte-parole de PDVSA a fait savoir que l'entreprise comptait contrôler à hauteur de 60% toutes les opérations de l'Orénoque et destiner l'essentiel des bénéfices à la politique sociale du gouvernement.

Hugo Chavez veut financer sa politique sociale.

Bolivie : nationalisations spectaculaires

Bolivie : nationalisations spectaculaires
Le Figaro, 02 juin 2006, (Rubrique International)

Les multinationales ont six mois pour négocier de nouveaux contrats.


«EVO MORALES a franchi toutes les limites. C'est bien simple, il ne nous reste rien !» La conclusion de ce dirigeant d'une des majors du pétrole montre bien à quel point l'annonce de la nationalisation des hydrocarbures (les deuxièmes gisements du continent), le 1er mai, a pris les acteurs de court. Plus qu'un recouvrement de souveraineté, le président bolivien a annoncé que le partage des bénéfices sur les deux principaux champs de gaz était totalement inversé, laissant aux multinationales 18% des gains pour financer dette et investissement et dégager des dividendes.

Les 180 jours concédés par La Paz pour négocier donneront probablement lieu à une marche arrière, au moins sur les futures explorations. Evo Morales veut faire justice à son peuple qu'il juge spolié par les multinationales. Il est vrai que le principal exploitant, la brésilienne Petrobras, achetait le gaz à bas prix – 3,6 dollars le m3 – et qu'elle a profité de sa position de premier investisseur du pays pour laisser plusieurs factures en souffrance.

La Paz voudrait une hausse de deux dollars, ce qui n'est pas excessif vu la hausse des cours. Mais échaudé par une nationalisation vécue comme un coup de poignard dans le dos, le Brésil envisage de diversifier son approvisionnement de gaz, en accélérant l'exploitation de ses propres ressources et en important du gaz naturel liquéfié (GNL) par méthanier. Privée du marché brésilien, la Bolivie resterait alors prisonnière de ses richesses, puisque sans accès au Pacifique.

Les multinationales ont six mois pour négocier de nouveaux contrats.

Chili : la dépendance absolue

Chili : la dépendance absolue
Le Figaro, 02 juin 2006, (Rubrique International)

Craignant les ruptures de livraison de ses voisins, Santiago se tourne vers l'Afrique et l'Asie.




LES FONCTIONNAIRES chiliens en tremblent encore de rage. En avril 2004, à la veille de l'hiver austral, le président argentin Nestor Kirchner décide unilatéralement de réduire de 3,3 millions de mètres cubes par jour ses livraisons de gaz au Chili, au nom de la préférence nationale, violant le contrat qui lie les deux pays depuis 1995. Le Chili ne peut plus se voiler la face : le pays économiquement le plus dynamique du continent n'a aucune ressource énergétique, et des voisins trop versatiles. Buenos Aires, toujours à la merci d'une pénurie d'électricité, pourrait de nouveau couper les robinets.

La Paz et Lima, bien nantis en gaz, répugnent à traiter avec le pays qui les a humiliés lors de la bataille du Pacifique, il y a plus d'un siècle. Santiago est prête à payer le prix de l'autonomie énergétique. La présidente Michelle Bachelet vient de poser la première pierre d'une usine de re-gazification de gaz liquéfié (GNL) à Quintero, près du port de Valparaiso. Le projet, construit avec la participation de la britannique British Gaz, devrait coûter 400 millions de dollars et couvrir 45% des besoins. En optant pour le GNL, le Chili peut désormais faire acheminer son gaz par bateau, d'Indonésie ou d'Afrique.

Craignant les ruptures de livraison de ses voisins, Santiago se tourne vers l'Afrique et l'Asie.

Brésil : un géant gourmand de gaz

Brésil :un géant gourmand de gaz
Le Figaro, 02 juin 2006, (Rubrique International)

Autosuffisant en pétrole, le pays est aussi un acteur du nucléaire et des énergies renouvelables.



LA PREMIÈRE puissance économique d'Amérique latine est aussi un géant de l'énergie. Le Brésil vient d'atteindre en mai l'autosuffisance pétrolière et de découvrir de nouveaux gisements de gaz en Amazonie. De quoi rééquilibrer les sources de son énergie électrique, aujourd'hui majoritairement hydraulique. Brasilia envisage aussi de relancer la construction d'une troisième centrale nucléaire. Il est par ailleurs le champion de la production de l'éthanol et du bio-diesel. La compagnie pétrolière nationale Petrobras est le leader mondial de l'exploration en eaux profondes, et détient la première capitalisation d'Amérique latine. Si elle reste sous contrôle public, Petrobras est aussi cotée en Bourse à Sao Paulo et New York, ce qui la pousse à maximiser ses propres rendements à court terme, en envisageant désormais d'exporter son pétrole. Une décision jugée dangereuse par de nombreux experts qui soulignent que le Brésil n'a pas plus de 18 ans de réserves et qu'il devrait garder ce pétrole pour des temps plus durs.

Le pays rencontre surtout des problèmes pour alimenter en électricité la région du Nordeste, souvent victime de sécheresse, et donc de pénurie d'électricité. Au milieu des années 90, Petrobras, sous la pression du gouvernement de Fernando Henrique Cardoso, a financé un gazoduc coûteux pour importer du gaz de Bolivie. L'opération, peu profitable pour la firme, a permis à de nombreuses entreprises de bénéficier d'énergie bon marché et induit une consommation croissante de gaz bolivien dans les États du sud du Brésil et dans l'État de Sao Paulo, poumon économique du pays.

Autosuffisant en pétrole, le pays est aussi un acteur du nucléaire et des énergies renouvelables.

La flambée du pétrole fracture l'Amérique latine

La flambée du pétrole fracture l'Amérique latine
Lamia Oualalou
Le Figaro, 02 juin 2006, (Rubrique International)

La hausse de la rente énergétique et l'arrivée au pouvoir de la gauche dans plusieurs pays du sous-continent aiguisent les tensions.


L'Opep est une organisation «anti-impérialiste», qui peut contribuer à la libération des peuples des pays en développement. C'est par cette formule provocatrice que le président vénézuélien, Hugo Chavez, a inauguré hier la réunion de l'Opep qui se tenait à Caracas. Les experts s'attendent à ce que les onze pays exportateurs de pétrole laissent inchangé leur quota de production, dans un contexte de flambée des cours mondiaux.



LES EXPERTS du pétrole ne savent plus où donner de la tête. «L'Amérique latine a longtemps été considérée comme une région stable pour les multinationales du secteur. Depuis quelques années, ce n'est plus le cas : les risques valent ceux du Moyen-Orient, de l'Afrique ou de la Russie», résume Jean-Marie Chevalier, directeur du Cambridge Energy Research Associates (Cera). Quelques années, ce sont plus précisément les années depuis lesquelles les gouvernements latino-américains ont basculé à gauche, sous la pression de mouvements sociaux. Parallèlement, l'envolée des cours des hydrocarbures a renversé le rapport de forces entre les multinationales et des Etats, soucieux de mettre la rente énergétique au service de politiques sociales.

Tout commence en 2002, par le bras de fer entre le gouvernement de Hugo Chavez, à la tête du Venezuela depuis 1999, et l'entreprise nationale PDVSA, qui constitue un Etat dans l'Etat. «PDVSA a alors sa propre ambition, celle de devenir une major mondiale», rappelle Jean-Marie Chevalier. Hugo Chavez y voit une poule aux oeufs d'or pour financer ses programmes de santé et d'alphabétisation. Il y tient d'autant plus que les cours du baril commencent à s'affoler, tirés par la demande chinoise et la tension au Moyen-Orient. Les cadres de l'entreprise se braquent et déclenchent, en décembre 2002, une grève de deux mois, avec l'espoir de faire tomber le président. Chavez tient tête. Les grévistes abdiquent, il en licencie 18 000. PDVSA tombe sous son contrôle.

Faire plier les multinationales

Chavez ne s'arrête pas là : à partir de 2003, il veut faire plier les multinationales en augmentant impôts et royalties. Enivrées par des cours toujours plus hauts, ces dernières acceptent. Le Venezuela ne recèle-t-il pas les plus importantes réserves au monde, en comptabilisant les huiles extra-lourdes ? L'exemple fait école. Arrivé au pouvoir au Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva durcit la législation à l'égard des multinationales pétrolières, contraintes de se fournir auprès d'entreprises brésiliennes. En Argentine, le péroniste Nestor Kirchner refuse aux exploitants de gaz d'augmenter leurs tarifs, comme le stipulent leurs contrats. Pour lui, ces textes ne valent rien face à la crise qui a mis son pays à genoux en 2001.

Pauvreté galopante

En Bolivie, la déflagration est violente. Depuis la privatisation des hydrocarbures en 1996, les compagnies pétrolières étrangères se croient maîtres du jeu dans ce pays qui dispose des deuxièmes réserves du continent. En projetant d'exporter le gaz vers le Mexique et les Etats-Unis, le président Losada provoque la colère de la population, certaine de ne pas bénéficier de l'opération. Cette première guerre du gaz se solde par la fuite du président pour Miami. Deux ans plus tard, son successeur, Carlos Mesa, jette l'éponge face à la surenchère de la population. Porté par la frustration des foules, Evo Morales est élu en décembre 2005 et annonce, le 1er mai dernier, la nationalisation des hydrocarbures.

Le mois dernier, l'Equateur a mis fin à la participation de l'américaine Oxy. Au Pérou, quel que soit le vainqueur dimanche, il sera contraint de revoir les conditions d'exploitation de son gaz. Pour faire plier les entreprises, les Etats ne jouent pas seulement sur les cours, mais aussi sur une apparente harmonie politique, de Caracas à Buenos Aires. Ce sont désormais les Etats qui commandent. Hugo Chavez en apporte la preuve en signant des accords de livraison à des prix préférentiels du pétrole aux pays d'Amérique centrale et des Caraïbes. Il lance l'idée d'un gigantesque gazoduc, des côtes vénézuéliennes jusqu'au coeur de l'Argentine. Tout le contraire de l'intégration opérée à la fin des années 90, quand l'implantation de onze gazoducs entre la Bolivie, le Brésil, l'Argentine et le Chili servait des intérêts privés et était financée par eux.

En flattant la fibre populaire, chacun des Etats bouscule ses voisins. En nationalisant son gaz, la Bolivie a fâché la brésilienne Petrobras et mis en péril son principal marché. En préférant alimenter son marché national, l'Argentine a privé le Chili de gaz et menacé sa croissance. La hausse du cours des hydrocarbures aurait pu permettre à l'Amérique latine de s'unifier et de défendre collectivement ses intérêts. Les derniers événements montrent qu'il n'en est rien.


La hausse de la rente énergétique et l'arrivée au pouvoir de la gauche dans plusieurs pays du sous-continent aiguisent les tensions.

Atteinte à l’environnement dans le secteur des hydrocarbures

Les compagnies pétrolières étrangères mises à l’index
par Safia Berkouk

Les firmes étrangères activant dans le secteur pétrolier en Algérie ne sont pas toujours respectueuses de l’environnement et des normes en la matière, notamment en ce qui concerne les mesures à prendre en cas d’abandon d’un gisement.

On affirme que des puits pétroliers exploités par les associés de Sonatrach sont abandonnés et enfouis sous terre sans aucune signalisation quant à leur emplacement. L’information a été révélée hier par des professionnels du secteur lors d’une conférence sur l’énergie et le développement durable organisée au siège de la compagnie nationale, à l’occasion de la célébration de la Journée mondiale de l’environnement.

Pour répondre à cette préoccupation, M. Aït Allak Madjid, directeur au niveau de la Sonatrach, a déclaré qu’un programme a été mis en place par la compagnie nationale des hydrocarbures en vue de la prise en charge de l’ensemble des gisements et puits abandonnés, qu’elle les aient exploités seule ou en association avec ses partenaires étrangers, et ce dans le but de réhabiliter les sites avant leur désertion.

Sonatrach dépensera dans les toutes prochaines années pas moins de 1,4 milliard de dollars pour réhabiliter l’ensemble de ses installations pétrolières et les mettre aux normes sécuritaires et environnementales requises, dans le cadre de sa politique HSE (hygiène, sécurité et environnement), selon M. Benadji, responsable au sein de la direction HSE.

Ces investissements sont impératifs pour permettre à la compagnie nationale de se conformer à la loi sur les hydrocarbures au même titre que ses associés d’ailleurs. L’ensemble des firmes activant dans le secteur pétrolier ont, d’après l’article 109 de cette loi, une période de 7 ans pour la mise en conformité des opérations, installations et équipements aux exigences des textes législatifs et réglementaires fixant les normes et standards techniques de sécurité industrielle, de prévention et de gestion des risques majeurs et de protection de l’environnement.

M. Allouani Rabah, membre de l’Agence de régulation des hydrocarbures, a indiqué que Sonatrach, qui a mis en place sa structure HSE pour répondre à ces exigences, a déjà réhabilité et mis aux normes requises un nombre important de ses installations énergétiques.

Dans une allocution, lue en son absence par son secrétaire général, le ministre de l’Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, a souligné que son département a entrepris depuis plusieurs années des actions qui s’inscrivent dans le cadre du développement durable et du respect de l’environnement.

Il s’agit notamment de l’élimination du torchage à l’horizon 2008, qui placera l’Algérie parmi les rares pays au monde venus à bout de ce phénomène coûteux et polluant, de la séquestration du gaz carbonique et de sa réinjection dans le sous-sol, du traitement des eaux huileuses et de l’alimentation de 25 villages du grand Sud en énergie électrique solaire.

Il a également été cité la réalisation de centres de traitement des eaux usées dans les zones de Hassi Messaoud et de Hassi Rmel, la réalisation de la ferme éolienne de Tindouf et la construction de la future centrale hybride soleil/gaz de Hassi Rmel.

Le ministre a rappelé également dans son allocution que dans le cadre du respect de la loi en vigueur, «tous les projets de réalisation d’installations sont précédés par une étude d’impact soumise à l’approbation du ministère de l’Environnement, qui statue sur l’opportunité de la mise en œuvre du projet».

M. Allouani a, quant à lui, rappelé que l’amont pétrolier est constitué d’une centaine de gisements avec une capacité de production de 1,4 million de barils de pétrole par jour et de 600 millions de m3 de gaz. Il compte également 19 systèmes de transport par canalisations avec un potentiel d’évacuation de 120 millions de tonnes de liquide par an.

S. B.

Egypt : New Tenders for Oil and Gas Exploration and Exploitation

New Tenders for Oil and Gas Exploration and Exploitation
Contributed by Ibrachy & Dermarkar
May 02 2006

Activities and investments in the Egyptian oil and gas sectors are constantly increasing. This is evidenced by two bidding rounds announced in February 2006. Ganope El Wadi Holding Company announced an international bid for the exploration and exploitation of natural gas and crude oil in eight blocks in the South Suez Gulf and the Eastern and Western Desert. In addition, the Egyptian Natural Gas Holding Company (EGAS) announced an international bid for the exploration and exploitation of natural gas and crude oil in 12 blocks in the Nile Delta, North Sinai and the Mediterranean Sea regions.

All companies specializing in natural gas and crude oil exploration and exploitation are invited to participate in the bids. They can obtain information regarding the conditions and requirements of the bids from Ganope (www.ganope.com) or EGAS (www.egas.com.eg).

Interested companies should submit their offers for both bids by July 16 2006.

vendredi, juin 02, 2006

Une solution en option, la séquestration

XXIe siècle. Environnement
Une solution en option, la séquestration

A terme, 20% des émissions de CO2 industriel pourrait être capturé et stocké en sous-sol.

Par Sylvestre HUETsamedi 03 juin 2006

Pratiqué depuis quelques années, étudié intensément, l'enfouissement géologique du gaz carbonique représente un défi technique, mais aussi une piste sérieuse dans le difficile dossier du changement climatique. Lorsque l'idée d'une telle solution est née, on a pu craindre qu'elle encourage la consommation des ressources fossiles ou qu'elle génère de nouveaux risques environnementaux. Rééxaminé par le GIEC (le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) dans un récent rapport (1), le projet de capter le CO2 industriel et de le séquestrer en sous-sol est redevenu d'actualité. Avec une dimension nouvelle, plus modeste dans ses objectifs, plus réaliste dans ses coûts, plus prudente dans l'estimation du risque... mais aussi plus probable dans sa réalisation. Exploration en huit questions.

Dans quelle mesure la séquestration du gaz carbonique peut résoudre les problèmes issus de l'usage des ressources fossiles ?

L'étude du GIEC estime que, d'ici 2050, la séquestration géologique pourrait concerner 20 % du total des émissions mondiales de gaz carbonique. Ceci, à condition que toutes les questions en suspens (sites de stockage, technologies de capture, coûts) aient été résolues et que la technique de séquestration ait été mise en place à l'échelle mondiale, sur la plupart des sources massives de gaz carbonique (centrales électriques au charbon, fioul et gaz, usines sidérurgiques, cimenteries, usines d'engrais...). L'effort vaut donc le coup. Mais cette solution technique ne sera jamais là qu'un des moyens de limiter la perturbation du climat, aux côtés des économies d'énergie, des techniques n'utilisant pas de combustibles fossiles (solaire, éolien, nucléaire, géothermique, hydraulique) et de la reforestation...
Quelles sont les sources d'émission de CO2 concernées ?

D'après le GIEC, on compte aujourd'hui sur la planète près de 8 000 installations industrielles émettant chacune plus de 100 000 tonnes de gaz carbonique par an. Ensemble, elles émettent plus de 13 milliards de tonnes de gaz carbonique par an. Parmi ces installations, il y a 5 000 centrales produisant de l'électricité ou de la chaleur. Ce nombre devrait croître fortement en raison des projets de centrales électriques au charbon et au gaz dans les pays émergents (Chine, Inde, Amérique latine).

Combien de CO2 pourrait-on stocker dans le sous-sol ?

Le BRGM (Bureau des recherches géologiques et minières) s'est livré à une estimation des capacités mondiales de stockage. Les gisements de charbon inaccessibles ou inexploitables ne pourraient accueillir que moins de deux ans d'émissions actuelles (40 milliards de tonnes). Les gisements d'hydrocarbures (gaz et pétrole) pourraient héberger 950 milliards de tonnes. En revanche, les aquifères salins (réserves d'eau souterraines impropres à la consommation) offrent une capacité de stockage allant de 400 à 10 000 milliards de tonnes. Il est possible de commencer à stocker dans les gisements d'hydrocarbures, mais si la séquestration du dioxyde de carbone est généralisée, le recours aux aquifères salins deviendra indispensable.

Le transport et le stockage du gaz est-il dangereux ?

L'essentiel du transport se ferait dans des gazoducs. Le gaz carbonique liquéfié pourrait également être convoyé en navires (comme le gaz naturel) ou en citernes. Les technologies sont connues, mais le risque d'accident par émission massive en région habitée doit être très bas pour être acceptable, le CO2 étant mortel si sa concentration dans l'air dépasse les 10 %. Ainsi, le dégazage brutal du lac Nyos, au Cameroun, en 1986, a tué 1 700 personnes. Installer un site de stockage près d'une zone habitée nécessite de vérifier que toute remontée rapide du gaz est exclue sur une durée très longue.

Que deviendrait à long terme le C02 stocké ?

Le CO2 doit être injecté à une profondeur d'au moins 800 mètres, sous 800 bars de pression et à une température d'environ 40 °C. Il se présente alors sous une forme dite «supercritique», ni gaz ni liquide, en équilibre avec son environnement. Son devenir est alors défini par ce dernier. Injectée dans un aquifère, une petite partie du CO2 va petit à petit se dissoudre dans l'eau (formant une énorme réserve d'eau gazeuse) puis réagir avec les minéraux et se transformer en calcaire, sur des milliers ou des millions d'années. Dans un gisement d'hydrocarbures, il va remplacer gaz et pétrole exploités. Dans un gisement de charbon, il va se fixer définitivement.

A-t-on déjà une expérience de la séquestration géologique ?

Il existe trois sites où l'on injecte environ un million de tonnes de CO2 par an. Un aquifère salin sous-marin en mer de Norvège, à partir d'une plate-forme pétrolière (Sleipner). Au Canada, sur le site pétrolier de Weyburn, avec un CO2 provenant d'une usine de gazéification du charbon du Dakota (Etats-Unis), située à 300 km. Un gisement de gaz, à In Salah, Algérie.

Peut-on stocker le CO2 dans les océans ?

Envisagée au départ, l'idée d'envoyer le gaz carbonique dans les océans ­ à moyenne profondeur ou dans les abysses ­ a été vivement critiquée. L'impact écologique soulève beaucoup de questions.

(1) Rapport téléchargeable sur http://www.ipcc.ch/