lundi, avril 18, 2005

Avenir de l’automobile : la Californie en pole position

par Annie Birdson, traduit de World Watch

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La Californie est lasse des carburants fossiles et exprime son impatience. Sixième économie mondiale, son air est le plus pollué des Etats-Unis. Les autorités de l’Etat ont tourné leurs regards vers l’hydrogène.


En octobre 2003, le gouverneur de Californie Arnold Schwarzenegger a pris le pouvoir à la suite d’une élection de révocation (de son prédécesseur). Il a promis alors la création de la première « Autoroute de l’hydrogène » et des stations proposant de l’hydrogène le long des principales route de l’Etat. « Je me propose de montrer au monde que la croissance économique et l’environnement peuvent co-exister » a-t-il annoncé aux électeurs dans son discours sur « l’état de l’Etat » en janvier 2004.

Une telle évolution peut sembler étrange de la part d’un ancien héros hollywoodien qui a été le propriétaire d’au moins sept Hummers, des véhicules gargantuesques qui font une quinzaine de kilomètres par gallon américain (3.78 litres). Mais Schwarzenegger tient sa promesse. Six mois après avoir pris ses fonctions, il a signé un ordre d’application pour le développement du nouveau Réseau californien d’autoroutes à l’hydrogène, d’ici 2010. Le but est d’accélérer la commercialisation des véhicules équipés de piles à combustible fonctionnant à l’hydrogène, l’un des vecteurs [1] d’énergie parmi les plus propres (voir notre encadré ci-dessous).

Transformer le système des transports de l’Etat, et par conséquent les 10 000 stations d’essence qui le jalonnent, pour l’éloigner du pétrole et l’amener vers des carburants alternatifs, constituerait un tournant capital pour la Californie - mais aussi pour le monde. La Californie vient en tête des Etats quant à sa consommation de pétrole aux Etats-Unis ; ses 30 millions de voitures, de camions et de bus, absorbent quotidiennement 150 millions de litres d’essence. Ces véhicules ont produit 60 pour cent des émissions de dioxyde de carbone dans cet Etat en 2003 et aujourd’hui plus de 90 pour cent des Californiens vivent dans des régions où les normes fédérales de qualité de l’air ne sont pas respectées.

Les autorités de l’Etat espèrent que la nouvelle Autoroute à l’Hydrogène aidera la Californie à respecter et même à dépasser ses objectifs concernant la pollution de l’air, parmi les plus exigeants au monde. En 1990, l’Etat a adopté une loi exigeant que 10 pour cent des nouveaux véhicules à la vente en 2003 produisent « zéro émission » (une norme modifiée depuis pour exiger que 2 pour cent des véhicules vendus n’émettent aucune émissions et que 8 pour cent soient des véhicules hybrides à basses émissions ou des véhicules super-propres). Puis, en 2002, la Californie devint le premier Etat à réglementer l’impact des véhicules à moteur sur le réchauffement planétaire, demandant aux fabricants de réduire de 30 pour cent leurs émissions de dioxyde carbone, de méthane, d’oxyde d’azote et de quelques autres polluants d’ici 2009. Les fabricants, cela ne surprendra personne, ont attaqué cette décision en justice.

De nombreux analystes voient dans l’hydrogène le moyen qui s’impose pour entreposer et pour déplacer l’énergie dans une économie post-hydrocarbures. C’est en effet une option très prometteuse pour remplacer à long terme l’essence parce que, contrairement aux carburants à base de carbone, l’hydrogène est abondant et il n’émet que de la vapeur d’eau (lorsque usage en est fait dans une pile à combustible). Par ailleurs, l’hydrogène peut être dérivé de l’eau en utilisant pratiquement toutes les sources d’énergie, parmi lesquelles bien sûr l’énergie solaire, l’énergie éolienne, et celle de la biomasse issue des cultures et des déchetteries. (A court terme cependant, la source la plus économique d’hydrogène sera probablement les carburants fossiles, en principalement le gaz naturel).

Ancien directeur de l’Agence californienne pour la protection de l’environnement et aujourd’hui secrétaire du Conseil exécutif de l’Etat (State’s Cabinet Secretary), Terry Temminen a imaginé un premier réseau, de 150 à 200 stations proposant de l’hydrogène, soit approximativement une station toutes les 30 kilomètres le long de l’Interstate 21. Les pompes se trouveront aux lieux d’entretien des arrêts de bus, sur les aires de repos le long des autoroutes, dans les stationnements de ces « grosses boîtes » qui font office de centres d’achats, et peut-être enfin dans certaines des 250 stations de l’Etat qui vendent aujourd’hui du gaz naturel. Le but est de rendre l’hydrogène accessible à la plupart des Californiens. Tamminen l’affirme : « Si vous arrivez à établir un réseau de base sur tout le territoire de l’Etat, vous pouvez donner confiance aux consommateurs... leur assurer qu’ils trouveront le carburant. »

Vous d’abord

Durant très longtemps l’hydrogène a souffert du problème de l’œuf et de la poule. Les développeurs d’installations vouées à la consommation d’hydrogène se sont montrés hésitants à investir trop lourdement sur ces sites parce que peu de véhicules peuvent vraiment en faire usage. Et avec une poignée seulement de stations, les constructeurs ont retenu la production à large échelle de véhicules équipés d’une pile à combustible. Bob Wilkinson, chargé d’un cours en études environnementales à l’Université de Californie à Santa Barbara, signale : « Pour que cela fonctionne, l’infrastructure et la technologie de l’hydrogène doivent être développées en parallèle ».

A propos des piles à combustible à l’hydrogène

Les piles à combustible sont une technologie électrochimique dans laquelle l’hydrogène et l’oxygène se combinent en présence d’un catalyseur pour produire de l’électricité. Dans un véhicule équipé d’une pile à combustible, l’électricité est utilisée pour alimenter un ou deux moteurs électriques. Les seuls co-produits de cette combinaison sont de la chaleur et de la vapeur d’eau, faisant de la pile à combustible une des rares technologies véritablement « zéro-émission ». Les piles à combustible sont également bien plus efficaces que les moteurs à essence et légèrement plus efficaces que les diesels.

Il existe au moins une demi-douzaine de piles à combustible avec des compositions, des électrolytes et des caractéristiques opérationnelles variables. De nombreux modèles, dont ceux faisant usage d’acide phosphorique ou de carbonate liquide comme électrolyte, ont été fabriqués en nombre suffisant pour montrer leur valeur comme fournisseurs d’énergie aux immeubles ou aux usines. Malgré leur coût actuel élevé, les piles à combustible PEM (membranes échangeuses de protons), qui opèrent à des températures beaucoup plus basses, ont les faveurs des industriels pour une utilisation dans les véhicules. Certains véhicules prototypes fonctionnant avec une pile à combustible ont déjà montré des accélérations et des autonomies impressionnantes, mais leur coût de fabrication demeure très élevé. Cependant ces véhicules comportent moins de pièces mobiles et pourraient en principe être moins bruyants, plus confortables, et durer plus longtemps en étant plus fiables. Ils pourraient être potentiellement plus faciles et moins chers à entretenir et ainsi rivaliser avec les véhicules fonctionnant avec des hydrocarbures. En principe par ailleurs, les piles à combustible pourraient même servir de mini-centrales électriques, alimentant le réseau durant ses périodes à l’arrêt.

Certains bureaux de poste, des banques, des centres informatiques et diverses entreprises profitent déjà de cet approvisionnement énergétique très sûr, sans interruptions, et décentralisé, fourni par les piles à combustible, ou en font usage comme générateur de secours. Les piles à combustible peuvent également être miniaturisées et être utilisées pour faire fonctionner n’importe quel appareil, de l’ordinateur portable au téléphone cellulaire, l’hydrogène pouvant prendre place dans un chargeur pas plus gros qu’un stylo à bille.



Plus récemment, les investisseurs ont embrassé une stratégie mieux intégrée. La plus grande partie du financement du réseau initial californien pour promouvoir l’hydrogène - dont le coût est estimé entre 74 et 200 millions de dollars US - devrait venir de partenariats privés, avec des soutiens limités des gouvernements fédéral, étatique et local. Les principaux acteurs sont la California Stationary Fuel Cell Collaborative, un groupe d’organisations œuvrant à la commercialisation de piles à combustible pour un usage stationnaire dans l’Etat, et, basé à Sacramento, le California Fuel Cell Partnership, une coalition d’intérêts publics et privés qui visent à faire progresser les nouveaux véhicules équipés de piles à combustible et les infrastructures liées aux technologies de l’hydrogène. Un membre du Partenariat, Toyota, construit certaines des stations de ravitaillement et expérimente des prototypes fonctionnant avec une pile à combustible.

Aujourd’hui l’enthousiasme pour l’hydrogène en Californie se répand. En décembre 2004, l’Etat a aidé au lancement de plus d’une douzaine de stations d’approvisionnement, dont des stations à Los Angeles, Davis et Oakland. Une vingtaine d’autres sont prévues dans les années prochaines dans le cadre de l’initiative pour une Autoroute de l’hydrogène. Selon les autorités de l’Etat, ces premières stations fourniront de l’hydrogène principalement pour des piles à combustible stationnaires utilisées dans des immeubles et par l’industrie. Le Partenariat californien pour la promotion des piles à combustible a lancé 55 véhicules prototypes sur les routes de Californie et prévoit d’en utiliser 300 pour la fin de 2007.

Un monde d’Autoroutes à l’hydrogène ?

Les Etats-Unis ne sont de loin pas le seul pays rêvant d’une Autoroute à l’hydrogène. D’autres pays, parmi lesquels le Canada, la Chine, l’Allemagne, l’Islande, le Japon et la Norvège, s’intéressent avec passion au potentiel de l’hydrogène. Brit Skjelbred, le Secrétaire d’Etat du ministère du Pétrole et de l’Energie de Norvège, a annoncé une Autoroute norvégienne à l’hydrogène longue de 500 kilomètres, associée à l’exemption des coûts d’enregistrement et de taxes annuelles pour les véhicules fonctionnant à l’hydrogène, lors d’une rencontre à Washington D.C en 2003. L’Allemagne a ouvert sa première station publique (à Berlin) en novembre 2004 et la Chine espère construire des facilités à Pékin pour l’approvisionnement d’autocars fonctionnant avec des piles à combustible lors des prochains Jeux Olympiques en 2008.

Parallèlement, l’Islande s’est donné pour objectif de devenir la première société ayant l’hydrogène pour base économique, et de s’affranchir totalement des carburants fossiles d’ici le milieu du siècle. Shell Hydrogène a ouvert la première station pour approvisionnement en hydrogène dans la capitale Reykjavik durant le mois d’avril 2003. Reykjavik fut également la première de 10 villes européennes à établir un programme hydrogène dans le cadre d’un programme européen intitulé 30 bus pour un système de transport propre. Aujourd’hui des nuages blancs de vapeur d’eau, plutôt que des polluants toxiques, sont visibles derrière les bus d’un certain nombre de villes. Les autorités politiques espèrent convertir prochainement la flotte de pêche et les avions du pays à l’hydrogène également. Elles bénéficient d’un soutien populaire important : selon une étude, l’initiative en faveur de l’hydrogène est approuvée par 92% des Islandais.

Lisa Mastny


La Californie n’est pas le seul endroit à tenter des expériences avec l’hydrogène dans le but de satisfaire ses besoins en énergie et en transports dans l’avenir. En juin 2002, une station de démonstration proposant de l’hydrogène comprimé a ouvert à Las Vegas, Nevada, et la ville convertit aujourd’hui une partie de son parc de véhicules à l’hydrogène. Un nouveau point d’approvisionnement a également été installé par Shell à Washington D.C. - le premier dans le pays à être hébergé dans une station publique, bien que, pour l’heure, seule une poignée de véhicules puisse en faire usage. Plusieurs autres pays ont pour projet de construire des autoroutes de l’hydrogène.

De nombreuses voies

Produire de l’hydrogène pour l’utiliser comme carburant reste cependant un défi. Bien que l’élément soit abondant dans la nature, il est habituellement lié à d’autres substances, comme l’oxygène dans l’eau ou le carbone dans les hydrocarbures. Pour produire de l’hydrogène, certaines stations le long de l’Autoroute de l’hydrogène vont faire l’électrolyse de l’eau, c’est-à-dire utiliser l’électricité pour briser la liaison moléculaire et isoler le gaz. D’autres stations vont extraire l’hydrogène d’hydrocarbures comme le gaz naturel ou le méthanol, par un processus appelé « reformage (catalytique) à la vapeur ».

Quelques entreprises espèrent passer outre les infrastructures coûteuses de l’Autoroute en apportant la structure d’alimentation directement aux habitations. Stuart Energy, de Toronto, développe ainsi une alimentation maison de la dimension à peu près d’une machine à laver, permettant aux propriétaires de produire leur propre hydrogène par électrolyse de l’eau. Installée dans un garage, l’unité pourrait fournir le carburant à une voiture durant la nuit, une période durant laquelle l’électricité est parfois moins chère. (Les propriétaires pourraient également installer des panneaux solaires sur leur toit pour éviter les impacts environnementaux de la production d’électricité au moyen de carburants fossiles.) A Latham, une entreprise new-yorkaise, Plug Power, travaille avec Honda au développement d’une alimentation résidentielle pour produire de l’hydrogène par reformage du gaz naturel.

Certains conducteurs préfèrent ne pas attendre la venue sur le marché de véhicules munis de piles à combustible. Ils convertissent plutôt des moteurs à combustion interne traditionnels pour qu’ils brûlent directement de l’hydrogène. (Les piles à combustible ne brûlent pas l’hydrogène, elles produisent de l’électricité sans combustion. Les moteurs à combustion cependant peuvent brûler de l’hydrogène moyennant quelques ajustements.) Quelques fabricants, dont Ford et BMW, ont développé des véhicules de démonstration équipés de moteurs fonctionnant à l’hydrogène. Responsable de l’environnement et de l’ingénierie liée à la sécurité chez Ford, Sue Cischke affirme : « Nous pouvons les construire et les vendre dès maintenant. » Le principal obstacle, selon elle, réside dans l’absence d’une infrastructure d’approvisionnement de l’hydrogène, mais également d’une réglementation unique permettant l’usage de véhicules à hydrogène à travers les Etats-Unis.


L’hydrogène embarque davantage de puissance par unité de poids que ne le fait l’essence, mais beaucoup moins de puissance par unité de volume, raison pour laquelle le développement de méthodes pour emmagasiner suffisamment d’hydrogène figure parmi les premières priorités. Il est cependant bien plus propre, émettant moins de sous-produits, même lorsqu’il est brûlé dans un moteur ordinaire. Peter Hoffman, éditeur de Hydrogen & Fuel Cell Letter, explique : « Les émissions sont pratiquement sans aucun effet, composées de vapeurs d’eau inoffensives et de quelques traces d’émissions provenant des lubrifiants du moteur. » « Aucun monoxyde ou dioxyde de carbone n’est émis. Aucun hydrocarbure non brûlé, aucune odeur nauséabonde, aucune fumée ou d’autres matières associées au carbone et aux rejets des carburants terrestres dangereux dont nous souffrons aujourd’hui. »

Bien qu’en soi, l’hydrogène soit propre, sa production n’est pas toujours bénigne pour l’environnement, qu’il soit destiné à la combustion dans un moteur ou à l’alimentation d’une pile à combustible. Les méthodes les moins onéreuses pour libérer l’hydrogène aujourd’hui - l’extraire du gaz naturel ou de l’eau en utilisant l’électricité de centrales alimentées par des carburants fossiles - sont encore passablement polluantes. Produire de l’hydrogène reste également inefficace au niveau du rendement, puisque isoler ce gaz requiert davantage d’énergie qu’il n’en contient. Dans un rapport récent, la Reason Foundation (libertaire) note que nombre des bénéfices « propres » qu’apporterait l’hydrogène seraient anéantis par le dioxyde de carbone et d’autres émissions générées lors de sa production et sa distribution. Le groupe défend l’idée que les bénéfices environnementaux visés seraient atteints plus sûrement par la réduction des vitesses sur les autoroutes, l’utilisation de plus petites voitures et davantage de mesures de conservation.

Les environnementalistes affirment cependant que des réponses à ces préoccupations pourraient en grande partie être apportées par une plus grande efficacité des moteurs - qui compenserait avantageusement l’énergie utilisée pour produire l’hydrogène - ainsi que par à l’usage à grande échelle des énergies renouvelables pour réaliser l’électrolyse de l’eau. En utilisant par exemple l’énergie solaire pour le produire, on ferait de l’hydrogène le vecteur énergétique propre par excellence, comme si l’on remplissait votre réservoir de soleil. Schwarzenegger lui-même a promis « qu’une proportion significative, et dont le pourcentage va augmenter » de l’hydrogène offert sur son Autoroute sera produit en utilisant de l’énergie renouvelable. (Pourtant il a récemment opposé son veto à une loi qui aurait accéléré la transition californienne vers les énergies renouvelables. Cette loi aurait exigé des producteurs d’électricité qu’ils obtiennent au moins 20 pour cent de leur électricité de sources renouvelables d’ici 2010 et non pas à partir de 2017 comme l’exige une législation antérieure.)

Les questions de sécurité pourraient être une autre pierre d’achoppement.
L’hydrogène peut fuir à travers de nombreuses substances, et comme c’est un gaz sans odeur et qui brûle avec une flamme claire, les fuites peuvent se révéler difficiles à détecter. Fabriquer des réservoirs résistants à de hautes pressions et à l’épreuve de fuites pour les stations offrant le carburant ou pour les véhicules demeure un défi. Pourtant le risque d’explosions est relativement faible. Le gaz est si léger qu’il se disperse dans l’air presque immédiatement et il est presque impossible de produire une explosion dans un endroit ouvert avec une étincelle ou même avec une flamme. (Contrairement à la croyance populaire, l’incendie de 1937 à bord de l’Hindenburg n’a pas commencé avec la mise à feu d’hydrogène faisant monter l’aéronef, mais la mise à feu de sa cellulose hautement inflammable ainsi que l’oxyde de fer et l’enveloppe en aluminium qui s’y trouvaient.)

Le côté ensoleillé de la rue

Dan Sperling, le directeur de l’Institut pour l’étude sur les transports à l’Université de Davis en Californie, estime important de ne pas donner une image négative de l’hydrogène. « L’hydrogène soulève des questions de sécurité mais c’est également le cas avec le pétrole. Prenez en considération les nombreux incendies et explosions dus à l’essence. Aucun ne se serait produit avec l’hydrogène. » Certains chercheurs défendent l’idée que l’hydrogène devrait être mélangé avec un colorant ou avec de petites quantités d’hydrocarbures gazeux pour améliorer la visibilité de la flamme. Des détecteurs sont également développés pour détecter les fuites d’hydrogène et provoquer une fermeture automatique du système en cas d’accident.

Dates marquantes du développement des piles à combustible et de l’hydrogène

1839 : Juge du Pays de Galles et physicien, Sir William Robert Grove conçoit la première pile à combustible en mélangeant de l’hydrogène et de l’oxygène en présence d’un électrolyte. L’objet produit de l’eau et de l’électricité, mais en quantité insuffisante pour qu’une utilisation en soit faite.

1889 : Les chercheurs Charles Langer et Ludwig Mond créent le terme « pile à combustible » alors qu’ils tentent de fabriquer la première pile à combustible utilisable utilisant de l’air et un gaz tiré du charbon.

1920 : L’ingénieur allemand Rudolf Erren adapte les moteurs à combustion interne de camions, de bus, et de sous-marins à l’usage d’hydrogène ou de mélanges avec de l’hydrogène.

1932 : L’ingénieur Francis Bacon développe la première pile à combustible performante en faisant usage d’électrolytes alcalins et d’électrodes de cuivre. En 1959, il fait la démonstration d’une pile à combustible de 5 kilowatts faisant fonctionner une machine à souder.

1959 : Chez Allis-Chalmers, l’ingénieur Harry Karl Ihrig invente une pile à combustible de 20 chevaux vapeur de puissance installée sur un tracteur.

Années 1960 : La NASA entreprend d’utiliser les piles à combustible avec de l’hydrogène issu de l’électrolyse de l’eau pour alimenter en électricité les vaisseaux spatiaux et approvisionner les astronautes en eau potable.

1994 : Daimler présente un véhicule, Necar 1, fonctionnant avec une pile à combustible. Depuis, la plupart des principaux fabricants d’automobiles ont développé des véhicules prototypes alimentés par une pile à combustible et fonctionnant à l’hydrogène.

1998 : A Chicago, des tests de deux ans sur route commencent pour deux bus alimentés à l’hydrogène. Trois autres sont entrepris à Vancouver au Canada.



En attendant que les difficultés du travail avec l’hydrogène soient réglées, la Californie, dans sa transition pour s’affranchir des carburants fossiles, met tous les atouts de son côté en promouvant toute une série d’autres technologies automobiles. Les carburant alternatifs incluent l’éthanol et le bio-diesel, un diesel propre produit à partir de sources renouvelables comme les huiles végétales. La Californie fait également davantage que tout autre Etat pour promouvoir l’achat de véhicules hybrides qui fonctionnent à la fois à l’essence et à l’électricité, comme la Toyota Prius, les hybrides de Honda (Civic, Accord et Insight), et la Ford Escape hybride. Dans tout l’Etat, des encouragements, parmi lesquels des rabais à l’achat ou l’exemption du paiement des places de stationnement, semblent porter leurs fruits : parmi approximativement 84’000 véhicules hybrides vendus aux Etats-Unis en 2004, plus de la moitié ont été achetés en Californie.

Directeur à Davis du Centre pour l’ébauche des véhicules hybrides électriques de l’Université de Californie, Andy Frank est un promoteur convaincu de « l’hybride plugiciel [2] ». Lui et ses étudiants ont converti neuf voitures de tourisme et des véhicules sportifs à la technologie qui permet aux véhicules de voyager jusqu’à 100 kilomètres sur l’alimentation électrique d’une batterie, après quoi le moteur à essence entre en action. Frank affirme qu’un usage à grande échelle de ces hybrides plugiciel (à motorisation successive, plug-in hybrid), pourrait réduire la consommation d’essence de Californie de 90 pour cent du fait que la majorité des automobilistes de l’Etat parcourent moins de 45 kilomètres par jour. Avec cette option de modulation, les automobilistes pourraient se recharger sur borne électrique lorsque la voiture n’est pas en usage, que ce soit à la maison ou aux 519 stations d’approvisionnement électrique existantes en Californie. Frank se consacre maintenant à promouvoir une adoption plus importante de cette technologie avec un groupe appelé le California Car Initiative (CalCars).

Finalement, bien que les promesses de l’hydrogène soient énormes, sa place dans le régime énergétique demeure obscure. Un sérieux débat se déroule au sujet de l’hydrogène, un débat aussi volatile que le gaz lui-même. Comme nous le laissons entendre ci-dessus, les promoteurs de l’hydrogène défendent qu’il sera un vecteur énergétique dans un avenir proche, alors que les sceptiques pensent qu’il faudra encore, au mieux, des décennies pour que l’hydrogène joue (peut-être) un rôle significatif dans l’économie énergétique. La crédibilité du rêve de l’hydrogène dépend largement des hypothèses de celui qui analyse son avenir, mais la vitesse à laquelle ce rêve sera réalisé - ou se fracassera - sera déterminé par les politiques gouvernementales.

De ce point de vue, la poursuite de son propre rêve pour l’usage de l’hydrogène par la Californie est significative. Le 22 octobre 2004, le Gouverneur Schwarzenegger a inauguré le premier point de vente d’hydrogène à l’Aéroport international de Los Angeles. Respectant une promesse qu’il avait faite, il se présenta à la pompe dans un Hummer converti à l’hydrogène. La perspective d’une multiplication de tels véhicules parcourant l’Autoroute de l’hydrogène est peut-être encore lointaine, mais néanmoins, d’une certaine façon, l’avenir mondial des transports apparaît aujourd’hui avec un peu plus d’espoir.

Annie Birdsong est pigiste, basée à College Park au Maryland.



Notes :

[1] En termes précis, l’hydrogène (comme l’électricité) est un vecteur énergétique et non un carburant. Alors que le charbon et le pétrole contiennent de l’énergie latente, placée en eux par une évolution géologique de millions d’années, l’hydrogène n’existe pas dans des puits ou des dépôts. Il doit être « fabriqué » (extrait) en utilisant une autre forme d’énergie - c’est la raison pour laquelle il est plus juste de dire qu’il « transporte » l’énergie résultant de sa séparation de l’eau ou d’hydrocarbures. Nous faisons usage du terme « carburant » dans cet article parce qu’il s’agit d’un raccourci utile.

[2] Ndt : Logiciel d’application complémentaire, ou procédé électronique, qui entre automatiquement en action, et ce, sans que l’utilisateur ait à intervenir. Comme exemples de plugiciels, on peut mentionner Acrobat Amber Reader de la société Adobe et Shockwave de Macromedia. Le terme plugiciel a été proposé par l’Office québécois de la langue française (juin 1996) pour désigner cette notion dont nous élargissons ici le sens librement. Mot-valise formé à partir des mots PLUs et loGICIEL, le plugiciel constitue un « plus » en augmentant les performances du logiciel (ici d’un moteur) principal. La prononciation du g est la même que dans logiciel. Le terme module d’extension (déjà attesté) et sa forme elliptique extension ont été adoptés par la Commission générale de terminologie et de néologie de France.